L'inquiétude exprimée hier par le grand argentier du pays, pourtant peu enclin à l'alarmisme, tranche avec les assurances de Sellal qui affirmait au cours de l'une de ses sorties que "l'argent, il en existe". La baisse des recettes pétrolières du pays n'est pas une invention d'opposants en mal d'arguments pour brocarder le bilan du pouvoir en place, mais bel et bien une réalité. Le ministre des Finances, Karim Djoudi, connu pour son sérieux et sa rigueur, s'est publiquement inquiété de la chute drastique des revenus pétroliers du pays. "Il y a une inquiétude que personne ne peut nier (...) d'où la nécessité de continuer à créer la richesse (hors hydrocarbures, ndlr) et de l'emploi et veiller à ce que nos équilibres ne soient pas perturbés à moyen terme", a-t-il déclaré hier à l'issue de l'adoption du projet de loi de finances (PLF) pour 2014 par l'Assemblée populaire nationale (APN), rapporte une dépêche APS. Motivant son inquiétude, le grand argentier du pays a expliqué que "la baisse de 12% des recettes d'hydrocarbures, à raison de 10% en volume et de 2% en valeur, la récession qui perdure en Europe, la faible croissance aux Etats-Unis et la baisse des projections de croissance dans les pays émergents, affectent déjà la balance des paiements du pays". Clair, net et précis. Déroulant son argumentaire chiffré, le ministre des Finances a soutenu qu'"avec des importations en hausse de 14% durant le 1er semestre de l'année, l'excédent commercial du pays a chuté de 50% sur la même période alors que l'excédent de la balance des paiements sera en 2013 inférieur à celui enregistré en 2012". Ce constat, un brin alarmiste du ministre des Finances, contredit ouvertement l'optimisme béat affiché il y a quelques mois par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui voulait rassurer les Algériens sur la "pérennité" des réserves pétrolières algériennes. Pour lui, les prévisions de certains spécialistes et hommes politiques sur un amenuisement des réserves algériennes en pétrole et en gaz ne sont que "purs mensonges". "Les réserves et les capacités de l'Algérie pour les futures générations sont disponibles", avait-il rétorqué. S'appuyant sur le dernier rapport mondial établi par des experts mondiaux, le Premier ministre avait lancé : "L'Algérie dispose de la 3e réserve mondiale en matière de gaz de schiste". "Cette richesse nous permet de poursuivre le développement de l'économie algérienne", avait-il encore insisté. Ce qui ne l'avait pas empêché de plaider la nécessité de sortir le pays de sa quasi dépendance aux hydrocarbures qui constituent 93% des exportations du pays. "Il est temps de prendre en main la situation avec davantage de sérieux et de développer l'économie nationale pour la booster vers de nouvelles perspectives." Il reste que le Premier ministre et son ministre des Finances ne sont pas sur la même longueur d'onde sur cette question. Même la solution prônée par ce dernier pour maintenir l'équilibre macroéconomique du pays face à la montée exponentielle des dépenses et la chute des revenus pétroliers, à savoir le recours à des coupes budgétaires, n'a pas eu, jusqu'ici du moins, l'assentiment des autorités. Cette nouvelle donne — baisse des revenus pétroliers de 12% en un semestre — poussera-t-elle le gouvernement à revoir sa copie en matière de politique budgétaire ? Invraisemblable à six mois de l'élection présidentielle. A. C. Nom Adresse email