En cette période de fêtes, le tableau des indicateurs conjoncturels de l'économie algérienne gâche les réjouissances. La dégringolade spectaculaire des cours du pétrole brut ravage sur son passage les perspectives macroéconomiques du pays. Mardi soir, Abdelaziz Bouteflika et ses ministres se sont mis à narrer les conséquences de la mésaventure économique du pays pendant les années fastes du pétrole cher. Depuis 2000, l'Etat a injecté près de 1000 milliards de dollars pour créer, au final, une économie plus que jamais dépendante du marché londonien du pétrole. C'est l'illustration la plus dramatique de ces longues années de gâchis économique. Les mauvaises nouvelles sont encore à venir. Les recettes du pays en devises devraient se rétrécir comme peau de chagrin, conséquemment à la chute prolongée des cours du pétrole. Mais pas seulement. L'angoisse est suscitée plutôt par la baisse continue des volumes d'hydrocarbures exportés. Depuis 2008, les ventes d'hydrocarbures se sont dangereusement contractées en volume pour atteindre un recul record en 2012-2013. Au premier trimestre 2014, la Banque d'Algérie sonne à nouveau le tocsin : sa note de conjoncture faisait état d'une baisse des exportations d'hydrocarbures de 9% en volume et de 12% en valeur. Aucun indicateur ne laisse présager un retournement de tendance dans les années à venir, sur fond d'amenuisement des réserves et de hausse effrénée de la consommation domestique d'énergie (10% de hausse par an en moyenne). A l'international, l'Algérie aura à batailler pour placer ses hydrocarbures. L'arrivée de nouveaux fournisseurs pousserait l'offre vers la hausse et les prix vers le bas. C'est ainsi que la chute des prix risque de s'avérer de longue durée, sonnant la fin de l'ère du pétrole cher. Cette dépréciation de la valeur du brent entraînerait le premier déficit courant du pays depuis 15 ans. Le déficit budgétaire se creuserait à plus de 7%, en raison surtout de la diminution des recettes des hydrocarbures, d'une nette augmentation des dépenses en capital et d'un niveau élevé des dépenses courantes. Le solde du Fonds de régulation des recettes (FRR) devrait se contracter en 2015 pour la deuxième année consécutive. Il n'a pas été alimenté depuis au moins trois années. Conçu initialement pour servir d'amortisseur macroéconomique, le FRR concourt, depuis quelques années déjà, à couvrir le déficit chronique du Trésor. Au premier semestre 2014, les avoirs en dinars stockés dans cette caisse d'épargne ont chuté à 4773,51 milliards de dinars, alors qu'elles étaient de 5238,80 milliards à fin 2013. Parallèlement à cette baisse des avoirs en dinars, les réserves officielles de change se sont contractées à quelque 193,2 milliards de dollars. Pour les années à venir, le recul des recettes pétrolières aura mécaniquement des répercussions sur les investissements publics et, par ricochet, sur la croissance et le PIB. Une chose est sûre : l'affaiblissement de la position du pays sur les plans budgétaire et extérieur, la dépendance financière des hydrocarbures et la dégradation des équilibres macroéconomiques ne sont pas conjoncturels. Ces déséquilibres structuraux ne datent pas d'aujourd'hui. Dans les cinq années à venir, le retour à l'endettement n'est pas à exclure.