L'opération de rapatriement des migrants nigériens décidée par l'Algérie et le Niger a tourné au vinaigre, hier à Oran. Dans la nuit du 24 décembre, vers 3h, une descente policière a ciblé les quartiers abritant des Nigériens, pour les emmener manu militari vers le nouveau centre d'accueil relevant de la direction des affaires sociales (DAS), à Bir El Djir. La police était appuyée par les éléments de la Protection civile et du Croissant-Rouge algérien. Mais le problème est que les commanditaires de cette opération nocturne n'ont pas fait de distinguo entre les migrants nigériens et le reste de la communauté subsaharienne qui habite à Oran. La police a procédé à leur embarquement, parfois de manière musclée, sans tenir compte de leur nationalité. Ils sont allés les chercher dans les hôtels où ils ont l'habitude de passer la nuit et même dans leur propre demeure. «En à peine 5 heures, de nombreux émigrés subsahariens qui habitent à Oran ont perdu tous leurs biens car quand ils ont été emmenés, les portes de leurs maisons étant restées ouvertes, des voyous n'ont pas hésité à les piller», nous explique un représentant de la communauté subsaharienne à Oran. Via les réseaux sociaux, ils ont dénoncé le «délit de faciès» dont ont été victimes ces émigrés et ont même parlé de «rafle». Hier matin, les rares membres d'associations caritatives ayant pu «s'infiltrer» à l'intérieur du centre d'accueil ont dénombré pas moins de 12 nationalités et un total de 600 migrants. «Tous les migrants placés dans ce centre ne sont pas des sans-papiers, il y en a même un qui est étudiant à l'université Belgaïd. C'est dire la désorganisation totale de cette opération !», s'indigne un citoyen versé dans l'action humanitaire. Hormis ceux du Niger qui seront rapatriés, les autres migrants ont été relâchés au fur et à mesure que la DAS procédait à leur fichage. Les membres du Croissant-Rouge, pour leur part, ravitaillaient le centre en nourriture et en eau. Cependant, des carences (notamment en matière de lait, de couches pour bébé et de médicaments) ont été relevées. Il était quasiment impossible de pénétrer à l'intérieur du centre de rétention. Le père Thierry, du diocèse de Saint-Eugène, a été empêché d'y accéder, alors qu'il souhaitait rencontrer ses coreligionnaires. En effet, parmi les migrants embarqués, on comptait autant de musulmans que de chrétiens et certains ont trouvé regrettable que cette opération soit menée à la veille de Noël, une fête sacrée pour les chrétiens.