L'éradication de l'informel n'est qu'une opération conjoncturelle. Dans la journée du jeudi, l'artère Mustapha Khalef, relevant de la commune de Ben Aknoun, a été fermée à la circulation. Et pour cause, les autorités locales étaient à pied d'œuvre pour l'éradication du marché informel qui se situe sur ce chemin depuis une vingtaine d'années, sous les yeux attentifs des agents de l'ordre public qui veillaient au grain. Le chemin de wilaya de Ben Aknoun, qui dessert du parc zoologique jusqu'à El Biar, était congestionné de part et d'autre, les automobilistes qui empruntaient le chemin pour aller vers les autres localités de la capitale étaient contraints de rebrousser chemin puisque la venelle Mustapha Khalef où étaient implantées des dizaines de baraques anarchiques, appelées communément «Pharmaciens», ont été éradiquées par les pouvoirs publics. Un grand chantier à ciel ouvert s'offrait au regard indulgent de la population de Ben Aknoun, étant donné que ce bazar était la cause de toutes les souffrances et du désarroi que subissaient les habitants limitrophes au quotidien. Il est à signaler que ce n'est pas la première fois que les citoyens de cette ville ont tiré la sonnette d'alarme auprès des autorités pour déloger cette structure anarchique, cette population a toujours plaidé pour la création d'un marché de proximité qui, jusqu'à aujourd'hui, n'existe pas à cause de la raréfaction des terrains sur les lieux. Il est toutefois important de déplorer tous les désagréments que ce marché engendrait, tels que l'insalubrité qui est ouvertement exposée à tout passant, l'embarras que les automobilistes subissaient en traversant l'artère, l'incommodité des passants qui ne trouvent que l'exiguïté de la chaussée au péril de leur vie, les brouhahas des klaxons ainsi que le stationnement gênant. «C'est vrai que certains faisaient vivre leur famille», nous dit un citoyen de Ben Aknoun. «Mais, ajoute-t-il, il faut dire qu'ils ont bien profité du manque de contrôle depuis des années pour dicter leur loi. Ils faisaient de gros bénéfices sur ce qu'ils vendaient, et puis ils changeaient d'activité quand ils le voulaient.» Et d'enchaîner : «C'est déloyal vis-à-vis des commerçants qui s'acquittent des impôts. Toutefois, ce n'est pas de leur faute, on les a laissé faire», nous a-t-il manifesté. Par ailleurs, il est nécessaire de rappeler que la crainte des habitants de revoir l'informel s'installer de nouveau n'est pas à exclure. «Nous, les riverains de Ben Aknoun, souhaitons que cette opération salvatrice des pouvoirs publics ne s'interrompe pas de cette manière. Il faut que la tutelle désigne d'ores et déjà la nature que va prendre cette parcelle ou procéder à sa clôture», estime notre même interlocuteur. Dans ce sens, ce n'est pas la première fois que les pouvoirs publics cumulent les échecs quant à l'éradication de l'informel, les exemples concrets sont du côté de Kouba (marché de Ben Omar), marché Tnach de Belouizdad, marché de Aïn Naâdja, ainsi que celui de Birkhadem où les squatteurs informels ont repris leur activité de plus belle, profitant de la passivité des agents de l'ordre public. L'éradication du marché de Ben Aknoun vient s'ajouter à l'autre opération déjà menée il y a quelques jours dans la commune de Rouiba où le squat et l'anarchie étaient légion. Par ailleurs, l'on se demande pourquoi le gouvernement a attendu la prolifération de l'informel sur l'économie nationale pour mener des opérations pareilles. Loin de nécessiter uniquement un coup de force des autorités, l'éradication des marchés informels a besoin de réponses durables. Pour ce faire, il faut recenser les vendeurs informels, les intégrer dans des infrastructures décentes et leur imposer la loi et la rigueur.