Encore une fois, la répression est de mise devant les revendications légitimes des citoyens qui s'expriment pacifiquement devant une machine répressive sans état d'âme. Des délinquants essayent de pousser la formidable mobilisation des citoyens à verser dans la violence. Le spectre de la fameuse «main de l'étranger» est bravé pour tenter d'entacher la crédibilité des animatrices et animateurs qui sont à l'avant-garde de la contestation de l'exploitation du gaz de schiste. D'un autre côté, la diversion est de mise pour accompagner cette répression des plus haineuses. Au moment où le sort de l'Algérie se joue au niveau de cette zone névralgique et que les multinationales se disputent notre souveraineté, les députés tentent de détourner l'attention de l'opinion publique à travers un débat primitif sur la tenue à imposer à la femme qui a courageusement participé à la lutte pour l'indépendance nationale et à celles de la démocratie, des droits de l'homme et de la question identitaire. Cette citoyenne à part entière, à laquelle on a déjà imposé un tuteur à vie à travers une loi rétrograde et obscurantiste, est assez consciente pour se prendre en charge et s'habiller comme elle le veut. Elle est actuellement mobilisée à la place Somoud à In Salah, comme elle l'était à la place Audin à Alger contre le 4e mandat. Il est important d'éviter cette diversion et de mettre un terme à ce débat préhistorique en revenant à la priorité nationale qui est celle de l'exploitation arbitraire et méprisante du gaz de schiste et de se retourner vers le Sud pour mieux comprendre la portée de cette opération qui se situe bien au-delà d'une simple transaction dans le cadre du marché des hydrocarbures. L'incompréhension des véritables enjeux doit être dépassée par un travail de conscientisation au niveau sociétal et tous les Algériens doivent comprendre que l'exploitation dangereuse du gaz de schiste est une affaire qui intéresse tout le pays. Ce n'est pas une question régionale. Elle relève de la souveraineté nationale. Elle se concentre aujourd'hui au niveau local par le fait que les gisements explorés se trouvent dans cette zone et par l'existence, au-dessus des gisements supposés, d'immenses nappes d'eau (phréatiques et albiennes) qui constituent une richesse colossale et une garantie pour l'avenir alimentaire du pays. L'exploitation éventuelle des gisements de gaz de schiste doit faire l'objet d'un débat national qui doit toucher à tous les aspects de cette question, à savoir les risques politiques, environnementaux et financiers. Il ne s'agit pas seulement de l'avenir du Sud algérien et de ses habitants, mais aussi de celui de toutes les régions d'Algérie. Comme le signalaient si bien les animateurs du mouvement antigaz de schiste à In Salah, seules les générations futures seront habilitées, au nom de l'équité intergénérationnelle, à prendre la décision de son exploitation ou non. Le niveau de conscience des habitants du Sud et la clairvoyance de leurs revendications présagent d'une vision de l'avenir bel et bien à la hauteur du combat qu'ils mènent au nom de toute l'Algérie. L'urgence d'aujourd'hui est celle de répondre favorablement au moratoire et à la revendication du gel de toutes les opérations de fracturation hydraulique par un décret d'annulation pure et simple de l'autorisation de l'exploration de ce gaz non conventionnel et de ce fait la révision de la loi sur les hydrocarbures après un large débat. Il est suicidaire d'assister à l'essoufflement de ce mouvement citoyen sans s'impliquer afin de porter le soutien nécessaire pour la continuité et la pérennité de cette ferveur nationaliste qui caractérise cette contestation des plus matures que l'histoire de l'Algérie indépendante à connues. Les citoyens d'In Salah ont donné la preuve que la conscience dormante au Sud est plus forte que toutes les tartufferies politiques qui se trament dans les salons. Malheureusement, le projet de dislocation et de désintégration de la société accéléré par le régionalisme négatif qui a caractérisé la gestion des institutions de l'Etat a créé un très grand fossé entre les différentes régions du pays. Il est aujourd'hui plus que jamais vital de fédérer tous les efforts citoyens et d'agir ensemble afin de construire une alternative fiable. Cette contestation de l'exploitation de gaz de schiste doit se généraliser à l'échelle nationale, mais elle doit se faire au niveau de la société civile pour pouvoir la protéger de toute tentative de récupération politicienne et c'est dans ce sens que les citoyens d'In Salah souhaitent que toutes les bonnes volontés de ce pays adhèrent activement à leur combat juste et honnête. La solidarité légendaire des Algériens est le seul recours pour pouvoir ressusciter ensemble l'esprit du Congrès de la Soummam et rentabiliser au profit de la citoyenneté cette lumière d'une résistance pacifique et responsable qui nous vient des profondeurs du pays de Tin Hinan. In Salah est aussi la Kabylie, la vallée du M'zab, le pays des Chaouis, l'Oranie… et Alger. Moussa Naït Amara ,Cadre pétrolier