La galerie Riwaq El Fen, créée et gérée par un collectif d'artistes à Maghnia, aborde sa dixième année avec un dynamisme remarquable, devenant sans prétention un pôle artistique de la région ouest et permettant même à la bourgade, abutée à la frontière, de dépasser en la matière Oran, capitale régionale et deuxième ville du pays, que les arts visuels boudent apparemment. En ce moment, REF qui prépare de nombreux autres projets, vit les derniers jours de la magnifique exposition de cinq peintres de Mostaganem, fruit d'une collaboration active avec l'Ecole régionale des Beaux-arts de cette ville. On y compte le bien connu Mohamed Oulhaci qui s'était fait un peu oublier ces derniers temps, mais qui poursuit sa démarche créative en la renouvelant. Ses «silhouettes évanescentes», essentiellement féminines, s'épanouissent désormais sur une palette plus vive et contrastée avec des effets saisissants de fusion qui, littéralement, rendent visible la chaleur. Hachemi Ameur, actuel directeur de l'Ecole des Beaux-arts de Mostaganem, gratifie le public de ses personnages «croqués» au trait noir, un peu à la Dubuffet, réunis en des scènes étranges (parfois peintes sur des coupures de presse) et s'exprimant plus par leurs postures que leurs visages d'ailleurs effacés. L'identité se dévoile-t-elle dans l'action ? Pour sa part, Saïd Chender joue des techniques mixtes sur toile dans la légèreté et la subtilité des couleurs. Ses compositions où dominent aussi les figures féminines sont parcourues de motifs du patrimoine. Un éloge serein et poétique parcouru par un trouble chromatique qui semble suggérer une nostalgie profonde. On retrouve les mêmes univers chez Saïd Debladji avec une approche très contemporaine des couleurs. Dans le beau catalogue de l'exposition, l'artiste Mohamed Massen affirme qu'il «ouvre à notre curiosité un éventail édulcoré entre figuration et abstraction, précision et gestualité technique (…) qui convoque des repères vernaculaires allusifs de notre culture». Adlane Djefal est bien ce «coloriste de talent» qu'affirme le critique Ali Hadj-Tahar. Sur cette voie qui fut celle du peintre Ali-Khodja, il nous offre de belles allégories obsédées par la question de la sédentarité (la chaise) et du voyage (la valise). A eux cinq, ces artistes aux correspondances créatives nombreuses forment une admirable proposition picturale qui confirme Mostaganem, ville natale de Mohamed Khadda et Abdallah Benanteur, sans compter Denis Martinez né près de Bethioua, comme un vivier encore vivant de l'art algérien. Le collectif de Riwaq El Fen à Maghnia a d'autant plus de mérite par le fait qu'il soit composé d'artistes soucieux de promouvoir d'autres artistes avec la conviction sereine que si le talent demeure individuel, le combat pour la Beauté ne peut être que collectif. Exposition «Sentiers», Riwaq El Fen, Maghnia, jusqu'au 31 mars. Avec le soutien du ministère de la Culture.