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Certains indicateurs financiers retombent dans le rouge 2015 : une nouvelle ère d'austérité
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Publié dans El Watan le 13 - 04 - 2015

La première année du 4e mandat de Abdelaziz Bouteflika aura été celle du retour à une situation financière loin des premières années reluisantes de son règne.
S'il a pu bénéficier au début de son premier quinquennat d'une conjoncture pétrolière favorable, l'inversement de cette dernière depuis la mi-juin 2014 annonce un dernier mandat difficile. Certains indicateurs économiques et financiers enregistrés à la fin de 2014 et toujours d'actualité confortent ces craintes. Selon la Banque d'Algérie, le pays a enregistré en 2014 le plus faible excédent commercial depuis 17 ans, d'à peine 600 000 dollars. La balance des paiements, qui a échappé de peu à la zone négative en 2013, n'a pas pu faire de même en 2014, dégageant un déficit de 5,8 milliards de dollars (graphe 1).
Les réserves officielles de change, présentées jusque-là comme une garantie contre tout choc externe, ont également subi les contrecoups de la chute de plus de 50% des cours du pétrole, perdant 15 milliards de dollars sur une année à moins de 180 milliards de dollars. La dernière fois qu'elles étaient passées en dessous de ce seuil remonte à 2010 (graphe 2).
D'autre part, la poursuite des dépenses publiques, notamment d'équipements dans une conjoncture marquée par un rétrécissement de la fiscalité pétrolière a pesé lourdement sur le Trésor public qui a perdu plus de 1000 milliards de dinars sur sa capacité de financement. Le gouvernement a indiqué qu'il ferait appel au marché financier pour alléger la pression sur le Trésor. Pas sûr qu'il en soit capable. La promesse de 2014 de relancer la Bourse d'Alger n'a rien donné. Celle-ci demeure au milieu «d'un imbroglio politico-financier qui reste à ce jour inextricable», selon l'expert financier Mohamed Ghernaout qui cite notamment «l'absence de volonté politique pour privatiser» les entreprises publiques et l'absence «de culture financière et de moyens financiers chez les ménages».
Erosion
Les chiffres de la Banque d'Algérie montrent néanmoins un point de satisfaction à retenir, à savoir «la désinflation». En 2014, l'inflation s'est établie à 2,92 % à décembre. Mais elle aura très peu été ressentie par la population au vu de la chute non freinée du le taux de change du dinar par rapport aux principales devises. Le cours annuel moyen du dinar s'est déprécié de 1,39% en 2014 face à l'euro, et de 1,49% face au dollar. Le ministre des Finances, Mohamed Djellab, a assuré qu'il ne s'agissait pas d'une dévaluation, mais d'une fluctuation liée à la volatilité des marchés des changes internationaux.
Dans un cas comme dans l'autre, c'est une nouvelle perte de pouvoir d'achat de la monnaie nationale et un poids supplémentaire à supporter par les ménages, quand on sait que cette dépréciation semble s'inscrire dans la durée. «Le taux de change du dinar par rapport à l'euro a perdu 27,1% entre 1999 et 2013», relève l'économiste Farid Yaici.
Remise en cause
Avec une situation financière moins clinquante, les promesses pré-électorales sont menacées à mesure que la position externe de l'Algérie se fragilise. En finir avec la crise du logement d'ici 2019 ou réaliser 7% de taux de croissance sont-ils encore possibles dans un contexte de pression sur les prix du pétrole du fait d'une augmentation des risques géopolitiques et une reprise «modérée de l'économie mondiale», selon le FMI.
Pour Farid Yaïci, certains facteurs sur le plan international suggèrent que les prix du pétrole resteront «encore bas pendant longtemps». Cela «n'augure pas de bonnes prévisions de croissance pour l'économie algérienne, pas plus d'ailleurs qu'en matière d'investissements et d'emplois, les effets sur la balance des paiements et les finances publiques ayant déjà commencé à être ressentis». Gel des salaires et des emplois dans la Fonction publique, report de certains investissements, ainsi que du crédit à la consommation, report de la création de nouvelles wilayas, sont quelques-unes des promesses compromises par la conjoncture.
Certains, pourtant, y croient. Safi Larabi, député RND, affirme que le gouvernement «va rationaliser, tout en gardant les mêmes niveaux d'engagements financiers» et de toutes manières, pour ne citer que l'exemple de l'emploi, «le rapport de la Cour des comptes fait état de 140 000 emplois dans la Fonction publique à pourvoir.
On peut commencer par consommer ceux-là avant de songer à en créer d'autres.» Mohamed Ghernaout, expert financier, pense que le gouvernement continuera à puiser dans le Fonds de régulation des recettes compte tenu des prix du pétrole appelés à rester bas et du déficit entre le prix réel de référence pour le budget de l'Etat et celui de la loi de finances. Fatalement, il y aura «soit une réduction des dépenses publiques, soit le maintien d'un niveau important des dépenses publiques et donc au recours au Fonds de régulation des recettes.» Du côté du FLN, on reste pourtant optimiste. «Le propre des crises économiques, c'est qu'on ne peut pas les prévoir, mais elles sont éphémères. Le gouvernement a des plans pour chaque scénario», précise Hocine Khaldoun, cadre du FLN et ancien député à l'Assemblée populaire nationale.
Effectivement, la crise financière de 2009 n'avait pas été prévue, et sa survenue avait mis à mal les finances du pays, poussant le gouvernement Ouyahia à prendre des mesures restrictives à l'importation. Nouvelle crise, nouvelles mesures d'urgence. Certains partis d'opposition s'inquiètent quant à un retour à la case départ. «Sans Parlement qui contrôle, sans pouvoir qui rend des comptes et avec la corruption qui saigne le pays, on craint pire que cela», confie Hamlaoui Akouchi.
Certains économistes laissent déjà planer le risque d'un retour à l'endettement extérieur. La conjoncture pétrolière favorable avait permis à l'Algérie de se désendetter, ce qui n'était pas forcément une bonne idée pour certains experts. «Il ne fallait pas stopper le financement extérieur, mais peut-être mieux le contrôler et sélectionner les entreprises qui devaient y recourir», estime l'expert financier Mohamed Ghernaout. «S'endetter est une manière d'augmenter le potentiel économique du pays à travers l'investissement sans toucher aux réserves de change qui doivent être utilisées à des fins stratégiques».
Il permet aussi de rester «informé de l'évolution des conditions des marchés financiers extérieurs, d'une part, et un moyen de pression sur les entreprises qui y recourent dans la recherche de performances de production et de résultats financiers sans cesse croissants, d'autre part». Selon lui, c'est une question de temps avant le recours à nouveau à l'endettement extérieur. «Cela dépend de la situation financière extérieure du pays. J'espère simplement que notre pays saura le faire au moment opportun, pas quand ça sera trop tard», afin d'éviter un scénario à la grecque.


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