Le drame d'hier qui a ravi la vie à la très jeune étudiante Mlle Kadache et secoué le plus en vue des campus universitaires du pays, l'université de Bab Ezzouar, est malheureusement loin de constituer un cas isolé. Ainsi et malgré la gravité de l'acte, la violence et l'insécurité font désormais partie du quotidien désolant de la communauté universitaire, atteinte elle aussi par cette spirale de violence qui s'installe dans la société. Tristement riche en actes d'agression, l'université algérienne déborde d'actualité du même type : en juin dernier, trois étudiants ont été blessés lors d'affrontements entre un collectif estudiantin et des agents de sécurité à l'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Un mois avant ces troubles, un groupe d'étudiants de la même université a fait l'objet d'une tentative d'homicide volontaire, dont l'auteur est un chauffeur de bus universitaire. Usant de son véhicule de service, le chauffeur a tenté d'écraser des étudiants qui se trouvaient sur son passage. Bilan : plusieurs blessés parmi les étudiants. A l'université de Tiaret, c'est une bataille rangée qui marquera les festivités de la Journée nationale de l'étudiant. Le 16 mai dernier, de graves incidents avaient secoué la cité de l'université Ibn Khaldoun de la ville de Tiaret, mettant aux prises des adhérentes d'organisations estudiantines rivales, dont celles affiliées à l'Aren empêchées par les animatrices du comité de la cité U d'animer une soirée artistique à laquelle fut conviée une « chaba » locale, provocant plusieurs blessées. Au mois de février passé, ce sont seize étudiants de l'université de Blida qui ont été placés sous contrôle judiciaire pour, entre autres, « attroupements illicites » et « destruction de bien d'autrui ». La section Cnes de l'université de Blida avait dénoncé, à l'époque, « les méthodes brutales des services de l'ordre » qui avaient effectué les arrestations et la « fuite en avant des responsables » face à la détérioration des conditions de vie des étudiants. A l'université de Sétif, un étudiant a été, en décembre 2005, victime d'une agression à l'arme blanche perpétrée par un employé du campus Mohamed Lamine Débaghine. Résultat : les camarades de la victime passèrent leur colère sur les équipements de la résidence universitaire. Le 19 décembre de la même année, l'université d'El Tarf fut le théâtre de violentes bagarres qui se sont soldées par une vingtaine de blessés parmi les deux groupes d'étudiants rivaux et une trentaine d'arrestations. A l'origine de la bataille rangée, un « vieux contentieux » entre les « clans » de Tébessa et d'El Oued. A Constantine, il a fallu l'intervention du wali pour « calmer » les étudiants du campus de Zerzara et de la nouvelle ville, excédés par la multiplication des agressions dont ils sont victimes. A l'université Emir Abdelkader, dans la même ville, les futurs imams, étudiants en sciences islamiques, se sont donné, un mois aparavant, en spectacle en transformant l'enceinte universitaire en véritable ring. Le motif fut l'ajournement de la rentrée universitaire par l'administration pour des considérations « techniques ». Les campus d'Alger n'échappent pas à cette réalité amère, tissée de violences sur fond de conflits politiques et idéologiques et dont les principales organisations estudiantines, appendices de partis politiques, portent leur part de responsabilité. Tout autant que les responsables du secteur, ni la multiplication des cas de violences, ni les interpellations répétitives de la communauté universitaire sur la montée de l'insécurité, ni les résultats à demi-teinte de la politique de privatisation des prestations universitaires, la sécurité y compris, confiées à des entreprises privées, n'ont pu les tirer d'une torpeur, dont les conséquences furent, on l'a constaté hier, meurtrières.