Comme un château de cartes, l'économie algérienne risque de s'effondrer à n'importe quel instant, emportant avec elle les fragiles équilibres sociaux maintenus grâce à la hausse constante des prix du pétrole durant les 14 premières années du nouveau siècle. Estimant que «la baraka fait partie de la bonne gouvernance», Abdelaziz Bouteflika n'a jamais fait de la création d'une économie forte et diversifiée, une priorité. Il s'est limité à distribuer la rente issue de la vente des hydrocarbures. Et aux avertissements de l'opposition et des experts, le pouvoir algérien a préféré la sourde oreille. L'essentiel étant de satisfaire un maximum de réclamations pour s'éterniser au pouvoir. Et lorsque le rigoriste Ahmed Ouyahia tente, en 2006, de mettre de l'ordre, il est limogé. Son successeur, Abdelaziz Belkhadem entame sa mission à la tête du gouvernement par des décisions populistes : augmentation massive des salaires des fonctionnaires et annulation des décisions que son prédécesseur a prises pour freiner l'impact de l'économie parallèle.Pour répondre à une partie de la classe politique – y compris de certains ministres, à l'image de Abdellatif Benachenhou –, Abdelaziz Belkhadem a répliqué sèchement : «Oui, il ne faut pas avoir honte de dire que les hydrocarbures sont notre principale ressource !» Une réalité qui finira par se retourner comme un boomerang à la face des dirigeants de ce pays. Lorsque la crise a commencé à pointer du nez, le gouvernement a paniqué. Mais au lieu de chercher à trouver une parade, le pouvoir algérien s'enfonce dans le déni. Mais face à l'évidence, les autorités ont fini par concéder qu'il y a «un problème». Et les remèdes ? On bricole. Les faits ont pourtant un air de déjà vu. Lors qu'au début des années 1980, les prix des hydrocarbures flambaient sur les marchés mondiaux, les Algériens découvraient une certaine opulence. Un responsable de l'époque s'est même amusé à proposer de «l'aide» à la France. Et devant des caisses pleines et malgré la pauvreté des Algériens, le régime de Chadli Bendjedid ne saivait pas où donner de la tête. Au lieu de construire une économie solide, on a préféré acheter des bananes et distribuer une «prime» touristique aux Algériens qui veulent voyager. Les pénuries qui ont suivi la chute des prix du pétrole, en 1986, ont plongé le pays dans l'incertitude. Conjuguée à une crise politique, la crise économique du milieu des années 1980 a produit les événements d'Octobre 1988. La suite a été dramatique.Les données actuelles convergent malheureusement vers un avenir incertain pour le pays. Les Algériens, habitués ces dernières années à avoir presque tout ce qu'ils demandent, vont devoir s'adapter à une période de privation, de pénuries. Pis, selon les économistes les plus optimistes, avec le rythme actuel des recettes, l'Etat n'aura même pas de quoi payer les salaires des fonctionnaires. Là, ce sera une autre histoire.