Bernardino Leon, l'émissaire onusien pour la Libye, a bien raison d'avoir le succès modeste. L'accord prévoyant la formation d'un gouvernement d'union nationale, qu'il a fait signer aux représentants du Parlement libyen établi à Tobrouk et à certains acteurs politiques, samedi soir au Maroc, n'aura véritablement de valeur que lorsque le Congrès général national (CGN) et les milices armées de Fajr Libya, contrôlant actuellement Tripoli, l'auront également paraphé. Sans cela, il lui est en effet impossible d'être opérant. Pour le moment, le Parlement de Tripoli ne veut rien savoir. Cela sera, semble-t-il, le cas tant que Bernardino Leon n'aura pas inclus dans le texte de l'accord le «respect» de la Cour suprême qui avait invalidé, en novembre dernier, les élections ayant conduit à la formation du Parlement de Tobrouk. Il s'agirait de la principale divergence qui oppose Tripoli et Tobrouk. Mais la liste des contentieux est encore longue. Eu égard à sa puissance de feu, Fajr Libya ne peut pas être ignorée dans tout processus de paix en Libye. Pour éviter l'impasse, l'émissaire onusien pour la Libye prévoit tout bonnement d'inviter les belligérants à poursuivre les négociations autour des points litigieux après le mois de Ramadhan. Donc du boulot, il en reste encore beaucoup. «Des progrès ont été accomplis, mais un travail crucial doit encore être fait», a d'ailleurs reconnu l'émissaire onusien, en référence à l'absence de la délégation de Tripoli. Bernardino Leon peut néanmoins se consoler d'une chose. Il n'est pas seul à batailler en faveur du règlement de la crise libyenne. En plus d'avoir l'appui agissant de l'Algérie, l'émissaire onusien peut aussi compter sur l'Italie. Le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, n'a pas manqué à ce propos de qualifier hier d'«étape importante» l'accord signé samedi à Skhirat. «L'accord de ces dernières heures sur la Libye est une étape importante dans les efforts pour stabiliser la région et rétablir la paix dans ce grand pays», a déclaré M. Renzi sur son compte Twitter. «Chaque jour qui passe, la nécessité de résoudre la crise libyenne apparaît plus évidente et centrale pour les risques liés au terrorisme comme pour les événements liés à l'immigration», a-t-il ajouté en assurant que l'Italie n'abandonnera «jamais ses amis et alliés». En proie au chaos depuis le renversement par l'Otan du régime de Mouammar El Gueddafi en 2011, la Libye compte, rappelle-t-on, deux Parlements — et deux gouvernements — qui se disputent le pouvoir, l'un basé à Tripoli et l'autre à Tobrouk, ce dernier étant le seul reconnu par la communauté internationale.