La rencontre, il y a une semaine, du chef du Mouvement pour la société et la paix, Abderrazak Makri avec le directeur de cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia, a suscité bien des interrogations sans toutefois constituer une surprise pour les observateurs de la scène politique. Point d'étonnement, expliquent des analyses, de voir le MSP reprendre langue avec un pouvoir qu'il connaît bien à force de l'avoir fréquenté et soutenu depuis 1992. Le MSP connaît même encore mieux les arcanes du pouvoir de Bouteflika, dont il a loué les mérites durant trois mandats successifs. Les interrogations suscitées par la rencontre Makri-Ouyahia ont surtout tourné autour du devenir de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique, dont la démarche ne correspond pas à celle engagée par la formation du MSP. Makri se défend pourtant de vouloir torpiller le contrat de Mazafran et justifie sans convaincre qu'il n'y a aucun changement dans l'attitude du MSP. Le changement est pourtant patent, le discours de radicalité, que ce parti avait tenu depuis plus de deux ans, – au demeurant étranger à la nature «conciliante» de la formation – est antinomique avec cette subite disposition au dialogue. Le président de la République, dont le MSP avec la CNLTD contestaient la légitimité et exigeaient le départ, est redevenu fréquentable pour la formation du défunt Mahfoud Nahnah. La sortie médiatique de Bouguerra Soltani, ancien patron du MSP, suffit à elle seule pour confirmer qu'il y a un changement de cap, malgré les démentis de Makri. Le jeu du MSP est quelque peu trouble. Cette formation anciennement membre de l'Alliance présidentielle semble vouloir jouer sur deux tableaux et deux projets. A la fois membre de la CNLTD et se disant libre d'avoir en parallèle un plan propre au parti, le MSP ne veut lâcher ni l'opposition ni le pouvoir. Pour ce faire, et tout en comptant sur son capital d'ancien allié des partis au pouvoir, il adopte à la fois deux projets, celui de la CNLTD réclamant des élections anticipées comme solution, ainsi que celui du FFS privilégiant le dialogue pour arriver à refonder un consensus national pour changer le système de gouvernance. Le chef du MSP, qui dit n'avoir représenté que son parti lors de son entretien avec Ouyahia, a pourtant adressé à ce dernier la plateforme de la rencontre de Mazafran qui avait regroupé l'opposition. A-t-il été mandaté pour le faire par ses pairs ? Où est-ce une manœuvre de sa part pour s'imposer comme le vrai interlocuteur sur lequel le pouvoir peut compter pour négocier avec l'opposition ? Abderrazak Makri est sans doute dans une approche intéressée, voulant gagner au moins sur l'une ou l'autre des options. Une danse bien propre à cette formation politique qui n'a eu de cesse de dérouter par ses va-et-vient entre pouvoir et opposition.