Un colloque scientifique sur le thème de «La toponymie algérienne : du local au national» sera organisé les 25, 26 et 27 juillet à Jijel. Organisé par le Haut-commissariat à l'amazighité (HCA), avec le soutien du ministère de la Culture et de la wilaya de Jijel, cette rencontre verra la participation de chercheurs nationaux de plusieurs universités du pays. Cinq séances sont au programme pendant les trois jours du colloque avec 26 thématiques sur la toponymie (système formé par les noms de lieux d'une région, d'une langue) en Algérie, animées par une trentaine de participants. «Avec ce colloque, on entend amorcer une réflexion sur le sens des toponymes dans le sillage des différentes langues utilisées dans un espace d'une période historique, voir comment les unes prennent racines et s'installent dans la durées et utilisons encore à nos jours ; d'autres sont oubliées mais les toponymes nous les rappellent (…). La toponymie nous renseigne sur leurs différents enjeux idéologiques et identitaires à travers les strates linguistiques qu'elle mobilise et les modifications que chaque conquérant imprime aux toponymes», précise le secrétaire général du HCA, Si El Hachemi Assad. L'institution que préside M. Assad rappelle que l'Algérie a connu ce processus historique de dénomination et de redénomination de son territoire à travers les âges et durant la colonisation française (où l'administration coloniale avait francisé les noms de la plupart des villes et villages) puis après l'indépendance par l'arabisation de l'environnement, conformément à deux textes juridiques : décret n°81-27 du 7 mars 1981 portant établissement d'un lexique national des noms de villes, villages et autres lieux ; loi n°91-05 du 16 janvier 1991 portant généralisation de la langue arabe. Cette dernière étape a eu pour conséquence, explique-t-on, de donner lieu à une sorte de «dualité» de la toponymie algérienne : face à une toponymie dite populaire ou de population, reflet de la mémoire collective et de la vie quotidienne, s'érige une toponymie «officielle», laquelle a une dimension éminemment politique que l'on continue d'ignorer dans l'usage quotidien, peut-être dans une tentative de réhabilitation des noms oubliés ou niés ; la toponymie amazighe, jusque-là dénaturée, parfois même gommée, en est le parfait exemple, relève-t-on encore. Cette situation a induit des dérèglements et de dysfonctionnements liés à l'écriture des noms de lieux et à leur aménagement linguistique qui entravent le bon fonctionnement des secteurs d'activité, engendrant, dans l'usage, des dommages et des incorrections, notamment au niveau des documents officiels. Selon les initiateurs du colloque, la «normalisation» de la toponymie officielle s'avère «nécessaire» suivant les recommandations de l'ONU, dont le Groupe d'experts des Nations unies pour les noms géographiques (Genung) chargé d'une telle opération. Le colloque de Jijel a plusieurs objectifs, dont le plus crucial est de connaître la place réservée à ce volet de l'identité algérienne qu'est l'amazighité dans l'élaboration des toponymes algériens. La rencontre d'experts permettra de s'interroger sur la primauté de l'arabe dans la transcription des toponymies malgré la reconnaissance de tamazight, de s'interroger sur l'absence d'une autorité nationale qui en aurait la charge et de connaître la place des langues maternelles du pays (l'amazigh, l'arabe dialectal). Il sera également l'occasion de connaître les implications de la politique toponymique du pouvoir central algérien face à la revendication identitaire amazighe. Le colloque verra la présence du ministre de la Culture Azzedine Mihoubi, du wali de Jijel Ali Bedrici, du secrétaire général du Haut-commissariat à l'amazighité, Si El Hachemi Assad.