C'est demain à La Havane que s'ouvre le 14e sommet du mouvement des pays non-alignés, avec un nombre de pays sans cesse plus grand, mais avec le même objectif qu'il y a près d'un demi-siècle, c'est-à-dire la libération comprise dans son sens le plus large avec ce qu'elle inclut comme rapports basés sur une stricte égalité et une émancipation totale. C'est d'ailleurs, au sein du mouvement que sont entreprises certaines actions pour donner corps à la philosophie du mouvement aux niveaux locaux et sectoriels. On ne compte plus les pays émergeants au sein des non-alignés, et d'ailleurs de nouveaux pôles apparaissent se placent en position de force pour revendiquer un plus grand rôle dans les relations internationales. C'est le cas des pays qui frappent à la porte du Conseil de sécurité, avec beaucoup de divisions il est vrai. Le président Bouteflika a quitté hier Alger à destination de La Havane. Après trois jours de travaux au niveau des experts d'abord et des ministres ensuite à qui revient la tâche de mettre au point l'ordre du jour des travaux et d'élaborer les résolutions du sommet, le ton en est donné en ce sens que cette rencontre a pris sur elle de traiter des phénomènes comme le terrorisme mais ave beaucoup de pertinence et de lucidité, du nucléaire iranien, et encore comme cela se fait depuis quarante ans, du conflit du Proche-Orient. Certains ont tenté une diversion en allant relever l'absence du président cubain Fidel Castro à l'ouverture des travaux des experts, ce qui est une erreur ou au pire une manipulation puisque la tradition a été respectée et c'est le chef de la diplomatie qui assume cette fonction. Fidel Castro a déjà annoncé qu'il serait en état de recevoir, après plus d'un mois de convalescence des suites de son opération chirurgicale et malgré une perte de poids de près de 20 kg. Cela étant, les hauts fonctionnaires des 118 pays membres se sont penchés sur un document final de 86 pages, traitant des questions mondiales, régionales et sous-régionales ainsi que du développement et des droits de l'homme. Une déclaration spéciale de soutien au programme nucléaire iranien, jugée « pacifique », est en préparation, a-t-on indiqué en marge des travaux. Le Mouvement des non-alignés prépare une vigoureuse condamnation d'Israël après son agression au Liban et dans la Bande de Ghaza. Le texte « se félicite du déploiement des forces armées libanaises au sud du fleuve Litani ». Le sommet de La Havane qui prend fin samedi, devrait marquer le début ou accompagner un vaste mouvement diplomatique qui se prolongera jusque dans l'enceinte des Nations unies où s'est ouverte, lundi, la 61e Assemblée générale ordinaire. Mais l'on retiendra à cet égard le fait que deux grands pays émergeants, le Brésil et l'Inde un des piliers du non-alignement, ont élevé mardi au rang d'« association stratégique » leurs relations déjà marquées par des combats communs dans les négociations commerciales multilatérales et pour l'obtention d'un siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU. A l'issue d'un sommet à Brasilia entre le président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, et le Premier ministre indien, Manmohan Singh, les deux pays ont signé neuf accords dans des domaines aussi divers que la coopération pétrolière, les échanges culturels, la coopération agricole ou les services aériens. Le président Lula s'était rendu à New Delhi en janvier 2004 dans le cadre de sa politique visant à encourager la coopération sud-sud et les alliances avec les puissances émergentes. « Depuis lors, nous avons travaillé intensément sur divers fronts pour approfondir notre alliance politique et économique que nous avons décidé de faire passer au stade d'‘'association stratégique'' », a déclaré le président Lula. « Le Brésil et l'Inde sont deux grandes démocraties du monde en développement, avec de nombreux intérêts en commun et des affinités dans leur vision des grands problèmes actuels », a affirmé le chef de l'Etat brésilien. « Notre engagement démocratique se reflète également dans les engagements que nous avons pris dans les enceintes multilatérales en faveur d'un système international plus équilibré et équitable », a-t-il ajouté. Le Brésil et l'Inde font partie, aux côtés du Japon et de l'Allemagne, d'un groupe qui réclame l'élargissement du Conseil de sécurité, composé de 15 membres actuellement (5 permanents et 10 non-permanents), à 25 (11 permanents et 14 non-permanents), avec une représentation accrue des régions. L'Inde et le Brésil sont également les locomotives du groupe de pays émergeants G20 qui lutte pour la fin des subventions agricoles dans les pays riches au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le président sud-africain, Thabo Mbeki, devait se joindre hier aux responsables Lula et Singh pour le premier sommet Inde-Brésil-Afrique du sud. Des accords tripartites devaient être signés. Les trois dirigeants évoqueront aussi les projets d'accord de libre échange entre l'Inde, le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay et Venezuela) et l'Union douanière d'Afrique australe (SACU - Botswana, Lesotho, Namibie, Afrique du Sud et Swaziland). De telles initiatives seraient susceptibles d'encourager cette fameuse coopération sud-sud que les non-alignés entendent développer.