De fil en aiguille, Alger a fini par être appréhendée à travers le prisme détestable du désordre de la dégradation qui se sont installés presque partout. Il ne faut pas être grand clerc pour le constater. Il suffit de déambuler à travers les rues, les artères, de se déplacer vers les périphéries de la cité, pour déceler des signes tangibles, des preuves patentes. La ville semble succomber irrémédiablement au peu flatteur statut de mégapole débridée, hétéroclite et décadente. La capitale, réputée jadis pour sa blancheur éclatante, s'est fanée, rabougrie, dépréciée, L'espace souffre d'une utilisation chaotique. L'urbanisation informelle aura fait son œuvre. La vie quotidienne est rythmée par tant de déficiences. Les contrastes se donnent à voir. Villas imposantes côtoyant des habitations à la limite du sordide. Trépidante, déroutante et tentaculaire, la ville n'échappe pas à un malaise ambiant et perceptible. Y a-t-il une fatalité à cela ? Pourtant, les plans d'aménagement n'ont jamais manqué. Le discours sur la ville en fait foi. Une littérature urbaine foisonnante atteste d'un jargon qui fait la part belle aux notions d'aménagement, de régulation de l'espace. La réalité, quant à elle, délivre un autre son de cloche. Une citadinité qui ne parvient jamais à prendre pied, à s'enraciner. A l'évidence, la planification, véritable pilier d'un ordre urbain réel, reste sous l'emprise de l'urgence, de l'aléatoire qui favorisent moult violations et dérèglements. La vision est erronée. On agit au coup par coup, on n'anticipe plus. Le résultat est décevant. Ce qui inquiète encore, semble-t-il, c'est cette fragmentation tranchée des couches sociales. Une « cacophonie » urbaine qui fait le lit d'une ségrégation urbaine. Des espaces pour gens riches et des banlieues pour pauvres. La boucle est bouclée. Elle risque de se développer davantage. Parler de lien social à restaurer, paraît bien difficile quand on persiste à réagir mollement aux inégalités par urbanismes interposés.