L'enfermement de la loi sur criminalisant les violences faites aux femmes dans les tiroirs de la Chambre haute du Parlement inquiète les associations féministes qui luttent depuis des années contre les violences infligées aux femmes. Une année après son adoption par l'Assemblée nationale avant d'être mystérieusement «bloquée» au Sénat, pas moins de 13 organisations de défense des droits des femmes, de prévention et de lutte contre les violences exigent la promulgation de cette loi pour stopper le drame de la brutalité contre les femmes. Il est urgent de mettre un terme à cette spirale. Dans une déclaration rendue publique hier, ces associations regroupées au sein du Collectif pour la promulgation de la loi contre les violences faites aux femmes, trouvent inadmissible le blocage d'une loi jugée comme une avancée considérable en matière de protection juridique des femmes. «Cette loi était attendue des victimes et demandée depuis des années par les associations de femmes, témoins quotidiennement des dégâts occasionnés par cette violence aux victimes directes comme à leurs enfants.» Les organisations signataires de la déclaration — on retrouve les plus actives : réseau Wassila, Rachda, Ciddef, SOS femmes en détresse, Tharwa n'Fadhma n'Soumer, AFAD, Femmes en communication et bien d'autres — estiment que la loi en question est «nécessaire, car elle doit redire haut et fort que les violences contre les femmes constituent un délit particulièrement grave car il détruit la société». Aux prises avec la réalité concernant les violences infligées aux femmes dans le foyer comme dans l'espace public, des militantes d'associations et des universitaires engagées constatent la montée des brutalités faite aux femmes, notamment les plus vulnérables. D'où l'urgence d'adopter la loi, estiment-elles. «Une année s'est écoulée et bien que la loi ait été votée le 5 mars par l'Assemblée nationale, elle n'a pas encore été adoptée par le Conseil de la nation. Pourtant le nombre de décès augmente, la liste des victimes s'allonge, les traumatismes s'exacerbent, mais le problème n'a pas semblé prioritaire pour les membres du Conseil de la nation et le gouvernement qui semblent ainsi considérer que la protection des femmes peut attendre encore», s'indigne le Collectif. Rongée par une violence endémique, la société a urgemment besoin d'y remédier. Les compagnons de Fatma Oussedik, Dalila Yamarène, Yasmina Chouaki, Fadhila Chitour-Boumendjel tirent la sonnette d'alarme : «Nous savons tous que la violence dans la société, dans tous les secteurs, que ce soit à l'école, dans les stades, dans la rue, trouve sa source dans la violence contre les femmes dans la famille, violence qui n'a jamais été sanctionnée ni prévenue par les autorités publiques.» Ils savent de quoi elles parlent. Se basant sur des faits et surtout sur les enquêtes sociales menées depuis des années, ces vaillantes militantes assurent que cette violence «a été le terreau de l'éducation d'une grande partie des nouvelles générations qui a malheureusement grandi dans la violence politique et sociale». Et d'asséner que la volonté de combattre la violence dans la société «ne peut donc faire l'économie d'actions contre toutes les violences faites aux femmes». Les associations se disent «mobilisées et vigilantes pour que les victimes bénéficient de la protection de l'Etat». La Chambre haute du Parlement est ainsi conviée à inscrire, à l'ordre du jour de ses travaux, cette loi dès la rentrée parlementaire. Le calcul tactique ayant poussé le pouvoir politique à «jeter aux oubliettes» cette loi suite à la levée de boucliers des opposants à une avancée en matière de protection des femmes s'apparente à une concession honteuse. Pis, un renoncement. Une abdication.