Avec la tripartite, la réunion avec les walis est l'autre grand rendez-vous par lequel le gouvernement tente de donner l'assurance d'une emprise sur la vie économique et sociale. «Je donne des instructions aux walis, donc je gouverne», pourrait être la devise du Premier ministre. Quant à l'ordre du jour de la rencontre d'aujourd'hui promettant de «booster» l'investissement productif, il nous apprend au moins que les allées de la crise économique seront pavées de bonnes intentions. Il est toujours possible de croire à un sursaut de bonne gouvernance au creux d'une faillite généralisée et que des ressorts insoupçonnés soient mis en branle pour redresser la barre de l'économie nationale. Cela pour être au diapason du dernier message présidentiel qui nous a prévenus contre le défaitisme pouvant ruiner nos chances d'une sortie de crise. Mais il est difficile de déceler, en haut lieu, une disponibilité à un effort en profondeur pour revigorer la vie économique quand on a vu, ces derniers jours, la moitié du gouvernement s'empêtrer dans les problèmes de passeport, de visa et de billets d'avion pour les futurs hadjis. Lors de la réunion d'aujourd'hui, il s'agira de demander aux walis de réaliser, dans l'urgence et à l'ombre des réductions budgétaires, tout ce qui n'a pu être fait durant les années d'embellie financière. Rien n'empêchait, depuis une quinzaine d'années, le gouvernement d'encourager la production nationale, de faciliter la mise en place des projets d'investissement en termes d'avantages fiscaux et d'accès au foncier industriel. Selon de nombreux hommes et femmes de l'opposition, le bilan de l'action gouvernementale se résume à la constitution d'une oligarchie ayant conclu un contrat politique avec le pouvoir en place. Un scénario-catastrophe qui est l'antithèse d'un développement économique équilibré et durable. Si le gouvernement a été incapable d'ouverture politique et économique, peut-il le demander à des walis qui, jusque-là, n'ont globalement servi qu'à maîtriser le front social ? Cette hypersollicitation sur le terrain du maintien de l'ordre et la hantise des accès de colère populaire ont récemment poussé à bout un wali, qui a eu des mots inconsidérés à propos du fléau des immolations. Chacun des walis qui participera à la réunion d'aujourd'hui et écoutera des communications sur la redynamisation de l'agriculture et la promotion du tourisme aura laissé dans sa circonscription des milliers de requêtes sociales en suspens, pouvant à tout moment se transformer en actions de protestation. Les autorités centrales savent très bien qu'il est illusoire de vouloir esquisser une activité touristique dans un pays où l'on risque, en s'aventurant en forêt, de tomber nez à nez avec des congressistes de l'AIS. De même que le secteur de l'agriculture a trop longtemps souffert de la corruption pour être revivifié dans les délais les plus courts. Les clarifications politiques, à défaut de la mise en place d'une véritable démocratie, sont les préalables à tout programme de relance économique. Tout le reste n'est que fuite éperdue face au spectre de l'explosion sociale.