La poudre aux yeux et les fausses promesses sur la stabilité économique et financière du pays commencent enfin à cesser. Même à demi-mot, le gouvernement, en effet, admet désormais la gravité de la crise qui secoue l'économie nationale et les lourdes retombées sociales qu'elle finira nécessairement par induire, à mesure que s'accentue la baisse des recettes d'exportations des hydrocarbures. De fait, tout en s'évertuant à garder un ton rassurant, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, n'a pas manqué, lors de la rencontre d'avant-hier avec les walis, de distiller quelques bonnes vérités sur l'état des finances publiques et des équilibres extérieurs du pays, au moment où les cours pétroliers mondiaux poursuivent irrémédiablement leur tendance baissière. Nombre d'analyses, rappelle ainsi le Premier ministre, convergent vers «l'étalement» de l'actuel épisode baissier des prix du brut sur une période, admet-il, «plus ou moins longue». Alors que l'épisode dont il fait état dure déjà depuis plus d'un an, qui coûte au pays plus de la moitié de ses revenus, le chef de l'Exécutif vient ainsi surtout avertir que la crise pétrolière actuelle est bien partie pour perdurer, avec toutes les retombées que cela suppose pour une économie qui dépend à plus de 95% de ses rentes de pétrole et de gaz. Depuis juin 2014, faut-il en effet rappeler, le baril de brent, pétrole de référence pour l'Algérie, a perdu quelque 60% de sa valeur. Entre-temps, l'Algérie a vu ses recettes d'exportations de gaz et de pétrole chuter de plus de 40%, rien que de janvier à juillet derniers, en comparaison avec la même période de 2014. Aussi, les exportations du pays ne couvrent désormais plus ses importations qu'à hauteur de 74%, tandis que le fameux Fonds de régulation des recettes (FRR), créé à la base pour gérer des surplus financiers, ne reçoit, lui, plus aucun sou, faute bien sûr de fiscalité pétrolière suffisante. Et c'est encore à demi-mot que le Premier ministre est venu admettre cette inquiétante vérité. «L'étalement de la baisse des cours pétroliers, a-t-il indiqué en ce sens, aura pour conséquence la contraction des ressources du Fonds de régulation des recettes et l'accroissement de la dette publique interne.» Une manière douce d'admettre en somme que le FRR n'offre désormais plus à l'Etat les moyens de s'autoriser de nouveaux déficits abyssaux et donc de maintenir le train habituel de ses dépenses. Le diagnostic étant ainsi communément admis, il ne peut qu'en être de même du remède à prescrire, sauf à croire aux promesses enchantées d'une diversification soudaine de l'économie. De fait, les quelques vérités distillées par le premier responsable du gouvernement servent surtout la cause d'un inévitable recours à des politiques de rigueur et d'austérité, dont l'étendue et l'intensité dépendront au final de la persistance ou non de la mauvaise conjoncture pétrolière. Le Premier ministre donne d'ores et déjà le ton. En 2016, a-t-il annoncé, «le gouvernement présentera un budget dont les dépenses globales seront en baisse de près de 9%». Pas question pour autant, pour Abdelmalek Sellal, de parler d'austérité, du moins pour ce qui concerne les besoins sociaux et d'équipements publics. Un sursis sans doute, dont continue à profiter le gouvernement, avant l'inéluctable accélération de l'effondrement des réserves de changes, «notre trésor de famille» pour reprendre le mot du chef de l'Exécutif.