Profitant de la passivité des autorités, les fraudeurs engrangent des sommes considérables dans cette activité au détriment des chauffeurs de taxi agréés. L'informel gangrène la société à tous les niveaux. Outre l'informel commercial à la peau dure, force est de convenir que d'autres pratiques existent, à l'instar du transport informel. Dans la capitale, le transport informel, communément appelé «clandestin», est une activité en plein essor qui a pris des proportions alarmantes, tel qu'il se présente en tant que sous-ensemble du transport terrestre. En dépit de la loi interdisant cette pratique qui, économiquement parlant, présente un amorce au développement du secteur des transports, les «clandos» continuent à braver l'interdit en toute impunité. Ces rabatteurs rôdent également auprès des stations de transport «réguliers», des hôpitaux, des marchés communaux, des hôtels ou même l'aéroport, où ils se greffent à l'espace réservé aux taxis. Pis, à la limite de la provocation, ils «racolent» les clients au nez et à la barbe des chauffeurs de taxi à des prix défiant toute concurrence, nous a-t-on confié devant la gare du Caroubier. Dans la commune de Kouba, les points recensés sont connus des citoyens ainsi que des services d'ordre, sans que ces derniers actionnent la manivelle pour les pourchasser. La station de métro Haï El Badr, qui était autrefois le terminus, est devenu le lieu de prédilection de ces rabatteurs, étant donné que le transport en ce lieu se fait rare. A l'est de la capitale, les chauffeurs clandestins, avides de gain facile, opèrent en toute impunité dans les zones suburbaines au vu et au su des autorités, a-t-on constaté à Qahouet Chergui ou devant la station de taxi de Bab Ezzouar, où ils pullulent et s'arrogent même le droit d'offrir, sans gêne, leurs services à la criée. Cette activité «sporadique», qui est difficile à quantifier sur le territoire de l'Algérois, selon les déclarations de M. Boulenouar, président de l'UGCAA, est exercée non seulement par des chômeurs, qui se rabattent sur cette «profession», mais il y a également des salariés et des retraités. «C'est pour arrondir les fins de mois, la vie est très chère», nous signifie un citoyen au revenu faible. Clandestins fidélisés A Ben Aknoun, place Maurice-Audin, place du 1er Mai, à Chevalley, les chauffeurs «clandestins» attirent une clientèle composée de toutes les catégories sociales. Certains «fraudeurs» comptent, témoignent-ils, des clients permanents. «J'ai plusieurs clients que je conduis quotidiennement à leur travail et que je récupère le soir», nous fait savoir un chauffeur de taxi clandestin. «Les clients sont disponibles la nuit alors que le transport fait grandement défaut», soutient-il dans son véhicule flambant neuf. Toutefois, si l'activité clandestine prend de l'essor, force est de constater que c'est parce qu'il y a un réel déficit en matière de transport, surtout le soir, où les chauffeurs de taxi agréés ne travaillent pas et se permettent même de choisir la destination. Les taxis agréés en détresse La situation qui prévaut constitue une «plaie» pour les chauffeurs agréés, agacés par cette pratique. «C'est de la concurrence déloyale pour nous et c'est du vol pour l'Etat», fulmine un chauffeur de taxi. Pour Hocine Aït Braham, représentant syndical des chauffeurs de taxi, «nous avons fait part de nos doléances aux autorités et aux syndicats, en l'occurrence l'UGTA, pour engager un mouvement de protestation, mais il a été décliné à maintes reprises». «Il semblerait que les autorités ne daignent pas enrayer le problème», se désole notre interlocuteur. Cet état de fait qui tend à se «standardiser» renseigne, si besoin est, sur l'indulgence des services de police avec cette catégorie qui anime ce phénomène de société, si ce n'est quelques arrestations occasionnelles. Pis, aucun plan de lutte contre le transport clandestin n'est mis en œuvre par les autorités concernées. Face à ce laxisme assumé, les chauffeurs de taxi clandestins semblent avoir de beaux jours devant eux étant donné que l'octroi des licences est soumis à des conditions «draconiennes» et est l'apanage des seuls moudjahidine et leurs enfants, dit-on. D'ailleurs, l'on s'interroge sur la délivrance des licences de taxi qui est sous la tutelle du ministère des Moudjahidine et non de celui des Transports !