Rappeler les faits de l'histoire et apporter son témoignage des événements historiques relève du devoir de mémoire. «Celui qui a un témoignage et qui le garde trahit son cœur et est coupable devant Dieu.» Tel est le premier message lancé par l'ancien militant de la Fédération de France, Mohamed Ghafir, dit Moh Clichy, aux élèves de terminale du lycée Cheikh Bouamama (ex-Descartes), à Alger, lors d'un forum organisé, dimanche dernier, par l'Association des parents d'élèves, à sa tête Brahim Mazouzi, en collaboration avec M. Abidi, coordinateur d'histoire à l'école, et la directrice de l'établissement fraîchement installée, Mme Benfreha, et ce, à l'occasion de la commémoration des événements du 17 Octobre 1961. Relatant le rôle déterminant de la Fédération de France lors de la guerre de Libération nationale, où des femmes et des hommes se sont engagés pour constituer un second front en comptant 350 000 Algériens dans ses rangs, Moh Clichy est revenu sur les principaux événements qui ont précédé le 17 Octobre. «Cette date constitue en fait la dernière étape de notre combat que nous avons mené avec détermination et courage», a-t-il souligné, avant de rendre hommage aux martyrs de la Révolution, car la «Seine avait englouti déjà des Algériens dans les années 1958 et 1959», a-t-il rappelé. Ton franc et mémoire infaillible, Mohamed Ghafir n'a pas manqué de relever le cynisme des responsables français à l'égard des Français musulmans algériens. Responsable du Comité de la Rive gauche dans la région parisienne, Moh Clichy a témoigné de toutes les actions mémorables menées par des Algériens bien avant le 17 Octobre 1961, telles que l'attaque des raffineries dans Paris, Marseille et Lyon, celle d'un ministre par un commando à la place de l'Etoile, l'assassinat de deux officiers et plusieurs autres offensives pour lesquelles les représailles ont été immédiates. Le sanguinaire Maurice Papon, alors préfet de police de Paris, a ordonné à ses équipes lors de l'enterrement de ces officiers de venger les leurs et «pour un coup donné, il faut en rendre dix», avait-il ordonné. Le conférencier s'est longuement étalé sur plusieurs événements, en citant toutes les dates marquantes recueillies dans son livre Droit d'évocation et de souvenance sur le 17 Octobre 1961 à Paris édité à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance nationale qu'il a conseillé aux élèves pour s'imprégner d'une partie de l'histoire de la guerre de Libération où il était acteur. Revenant au 17 Octobre 1961, Moh Clichy raconte cet événement avec beaucoup d'émotion, tout en relatant tous les détails relatifs à l'organisation des manifestations et l'instauration du couvre-feu. «Ce qui ne nous a pas empêchés de lancer notre appel à toutes les femmes et les hommes, par le bouche à oreille, pour sortir dans les rues de Paris. Un crime contre l'humanité a été commis ce jour-là dans la capitale des droits de l'homme», a-t-il regretté, tout en se félicitant qu'enfin la France ait reconnu pour la première fois son crime en 2012. Moh Clichy n'a pas manqué de rendre hommage à une lycéenne victime de la féroce répression policière, Fatima Bedar, âgée de 15 ans, jetée à la Seine ce jour-là reconnue à la morgue par son père grâce à ses tresses . «Je suis aujourd'hui heureux que la ville de Saint-Denis ait baptisé un grand jardin public au nom de cette jeune lycéenne Fatima Bedar en tant que martyre et symbole du sacrifice de la femme algérienne, lors de ces événements.» Une leçon d'histoire dont, sans doute, de nombreux élèves se souviendront.