La secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, a dressé, hier, un sévère diagnostic de la situation qui prévaut dans le pays. Elle a critiqué les orientations économiques, sociales et politiques qui augurent d'«un regain de tension et d'une détérioration du tissu social national». Mme Hanoune tire la sonnette d'alarme parce qu'il y a «péril en la demeure». Analysant, lors d'une conférence de presse tenue au siège de son parti, le message du président de la République adressé au peuple à l'occasion du 1er Novembre, la leader du PT doute que le chef de l'Etat soit au courant du contenu de cette lettre et surtout de ce qui se passe dans le pays. Mme Hanoune est convaincue que l'on ne dit pas toute la vérité au Président et que certains responsables cachent volontairement leurs véritables desseins. Mme Hanoune se pose des questions. Bouteflika est-il au courant du contenu de la loi de finances 2016 ? Une loi qui renferme des dispositions anticonstitutionnelles et qui s'inscrit en porte-à-faux avec le discours d'investiture qu'il avait prononcé en 2011. Ministre «ultralibéral» Le Président est-il au courant que le ministre des Finances, un ultralibéral, a bafoué toutes les lois de la République et se comporte comme un chef d'Etat ? Bouteflika est-il au courant que la nouvelle orientation politique et économique ouvre la voie à l'indigénat et à l'oligarchie ? Bouteflika, qui était contre le recours à l'emprunt externe, sait-il que 10 ans plus tard, le gouvernement parle de retour à l'endettement ? En tant que responsable politique, Mme Hanoune explique qu'elle se doit de s'interroger : «Notre caractéristique est de dire la vérité au peuple. Et nous pensons qu'aujourd'hui, l'Etat est déstabilisé et fragilisé. Le message du Président comporte des mensonges. Les rédacteurs de cette lettre ont menti au Président et au peuple.» Mme Hanoune insiste : «Comment sommes-nous arrivés à cette situation ? Cela est-il dû à la maladie du Président ou est-ce le prix du 4e mandat ? Dans ce cas, pourquoi ne pas revendiquer l'application de l'article 88 de la Constitution ?» La secrétaire générale du PT refuse de porter un jugement sur l'état de santé du Président : «Nous ne sommes pas en mesure de décréter que Bouteflika est dans l'incapacité de gouverner parce que nous ne l'avons pas rencontré. Maintenant on le voit, il rencontre des personnalités étrangères, il tient des Conseils des ministres, il signe des décisions. Mais nous avons le droit de connaître la vérité. Il n'écoute plus les cris des citoyens et des partis. Il y a un mur dressé depuis son investiture.» Mme Hanoune affirme détenir des preuves que certains responsables ne disent pas la vérité au Président. Le PT, selon Mme Hanoune, s'inscrit dans une démarche différente des autres partis qui revendiquent la transition. «On ne veut pas d'un Président non élu. Un président doit être l'émanation de la volonté populaire», note-t-elle. Et d'ajouter que le chef de l'Etat n'a en aucun cas une vision ultralibérale, contrairement au ministre des Finances. Louisa Hanoune n'a pas ménagé ce dernier qu'elle accuse de spolier certaines prérogatives du Président. La patronne du PT ne comprend d'ailleurs pas comment un portefeuille de souveraineté comme les finances est attribué à Abderrahmane Benkhalfa, un ministre qui a piétiné, selon elle, le principe de la séparation des pouvoirs exécutif et législatif. «Comment un Président laisse-t-il un ministre des Finances lui retirer une de ses principales prérogatives, à savoir la signature de la loi de finances annuelle ? L'article 71 de la nouvelle loi de finances permet au ministre des Finances de 'tripoter' les budgets sans l'aval du Président. Dans ce cas, il n'y aura plus d'Etat et plus de Président», dénonce Mme Hanoune, qui déplore également la politique d'austérité sauvage que prône le gouvernement qui fait dans «l'illégalité et l'anticonstitutionnel».