"Il y a un mur qui est dressé depuis l'investiture de Bouteflika", a déclaré, hier, Louisa Hanoune, au siège du PT, à Alger. "Est-ce qu'il est au courant de tout ? Il y a plus que des doutes", a-t-elle martelé. Si elle ne remet pas en cause la légitimité du président de la République et refuse d'émettre quelques jugements sur son état de santé, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Mme Louisa Hanoune n'en exprime pas moins des doutes concernant la paternité de certaines initiatives et de certaines orientations, comme le contenu du dernier message du Président à l'occasion du 1er Novembre "Je ne dirais pas que le Président est en état d'incapacité, je ne l'ai jamais dit. Je dis : est-ce qu'il est au courant ? Je ne crois pas qu'il soit au courant de tout ce qui se passe. Nous avons le droit de connaître la vérité. Il n'écoute plus les cris des citoyens et des partis. Il y a un mur qui est dressé depuis son investiture", a déclaré, hier, au siège du parti à Alger, Louisa Hanoune. "Est-ce qu'il est au courant de tout ? Il y a plus que des doutes", a-t-elle martelé. Pendant près d'une heure, Mme Hanoune s'est exercée à décortiquer le message du 1er Novembre, un message qui soulève beaucoup plus d'interrogations, à ses yeux, qu'il ne répond aux aspirations et aux attentes des citoyens. Autant pour la loi de finances que pour le message, elle suggère que le président Bouteflika est tenu dans l'ignorance par rapport à certaines orientations. "Est-ce que le Président est au courant qu'on va vers l'austérité ? Sait-il que l'économie est livrée à la prédation ? Il n'y a aucune indication sur la lutte contre la corruption dans le message. Sait-il que le marché du gré à gré a été généralisé, que la privatisation-désertification qu'il a lui-même stoppée a été rétablie ? Est-ce qu'il sait que le dérèglement économique est érigé en système, qu'il y a des interférences entre institutions ? Sait-il que Sonelgaz est en danger et qu'il y a volonté d'ouvrir son capital ? Sait-il qu'il n'y a aucun secteur qui a échappé à la prédation ?", s'est-elle interrogée. De fil en aiguille, elle se demande comment le Président abandonne à son ministre des Finances - qu'elle dénonce de s'être exprimé sur certaines augmentations alors que la loi de finances est toujours en discussion au niveau de la commission à l'Assemblée, un ministre qui "n'a pas la culture de l'Etat", dit-elle - certaines de ses prérogatives. "Ce n'est pas possible qu'un président de la République, quel qu'il soit, laisse un ministre des Finances lui retirer une de ses principales prérogatives, à savoir la signature de la loi de finances annuelle. L'article 71 de la nouvelle loi de finances permet au ministre des Finances de piquer dans le budget d'un autre secteur. Si un ministre peut piquer dans le budget d'un autre secteur et tripatouiller la loi, dans ce cas il n'y aura plus d'Etat et plus de Président", s'indigne-t-elle. Tout en s'interrogeant, également, sur ce que recouvrent certaines annonces contenues dans le message, Mme Hanoune redoute qu'il ne s'agisse, en définitive, que d'un simple "lifting" de la Constitution, contrairement à ce que le Président avait annoncé quelques années plus tôt. "Dans le message, il n'a pas évoqué la pollution politique et parle seulement de révision. Donc possible que ce soit un lifting". Elle accuse, dans ce contexte, certains cercles et l'oligarchie de chercher à maintenir le statu quo. "Il y a certaines parties qui veulent le maintien du statu quo et pousse le Président à renoncer à certaines réformes", accuse-t-elle. Selon elle, il y a même des responsables qui lui cachent la vérité. "Avant, il faisait de belles lettres. Mais depuis qu'elles sont lues, la tonalité a changé, l'empreinte aussi (...) Je sais qu'il y a ceux qui l'induisent en erreur. J'en ai eu même la preuve." Interrogée sur le mécanisme pour le contrôle des élections, Louisa Hanoune s'est interrogée sur son efficacité d'autant que d'autres structures ont existé sans pour autant empêcher la fraude. En tout cas, son parti attend la publication du projet pour se prononcer définitivement car, jusque-là, "il ne s'agit que de titres et d'intentions". Enfin, revenant sur la LF 2016, Louisa Hanoune réitère ses mises en garde : "Nous sommes dans une situation où l'Etat est déstabilisé et très fragilisé. Et cette loi de finances instaurera une politique d'austérité sauvage, dès lors qu'il y a réduction du budget de fonctionnement et d'équipement de plus de 20%. Ce gouvernement fait dans l'illégalité, mais il est certain que le Président dans ces conditions ne peut pas être au courant de tout", conclut-elle. K.K.