La bataille pour les prochaines sénatoriales fait rage dans les rangs des deux partis du pouvoir, le FLN et le RND. Et entre ces deux formations pour engranger le maximum de sièges de nature à leur permettre de négocier en position de force la constitution d'une majorité sénatoriale. Le choix des candidats au sein de ces deux formations n'a pas dérogé à la règle sacro-sainte de la cooptation régissant leur fonctionnement. Les critères de militantisme, de compétence, de sagesse traditionnellement associés au poste de sénateur n'ont pas toujours prévalu dans les «primaires» lors de l'établissement des listes de candidatures. Cette phase a été marquée, cette fois-ci également, comme de coutume, par des batailles rangées entre partisans de candidats d'un même parti se disputant le poste de sénateur. Mais qu'est-ce qui fait donc courir les états-majors des partis politiques pour vouloir intégrer en force le Sénat ? Pourtant, nombre d'observateurs avaient prédit, à un moment donné, sa suppression pure et simple au motif que cette Chambre faisait double emploi avec l'Assemblée populaire nationale. Dominée par la même majorité politique composée du FLN et du RND, qui se partagent les sièges des deux Chambres du Parlement, la démocratie parlementaire en Algérie ne s'est pas mieux portée avec la création du Sénat. Et lorsqu'il arrive — chose rarissime — au Sénat, à travers son bureau, de bloquer un projet de loi voté par l'APN, c'est moins le fait d'un sursaut démocratique de parlementaires soucieux d'exercer pleinement leurs prérogatives de représentants du peuple que de calculs politiques étroits ; l'expression d'un combat d'arrière-garde. Comme ce fut le cas avec le projet de loi criminalisant les violences faites aux femmes qui sommeille dans un tiroir du Sénat depuis plusieurs mois. Constitutionnellement, le Sénat est doté de pouvoirs législatifs étendus lui permettant de censurer l'Apn et de lui renvoyer des projets de loi pour une seconde lecture. Ce cas de figure ne s'est jamais présenté et ne risque pas de l'être avec le système politique en place. Pour les partis — Fln et Rnd — qui se disputent le statut de première force politique au Parlement dans ses deux Chambres, diriger l'APN et le Sénat en investissant le bureau et les commissions permanentes leur permet de négocier avantageusement des postes au gouvernement et dans les institutions de l'Etat. C'est tout le sens de la bataille féroce que se livrent les deux partis du pouvoir, qui affichent publiquement leurs ambitions d'accaparer les leviers du Sénat. Les amendements pressentis dans le cadre du projet de révision constitutionnelle ont aiguisé les appétits de ces formations, qui rêvent de diriger l'Exécutif sur la base des nouvelles règles de nomination du Premier ministre, qui devrait être issu du parti majoritaire. Cette course aux postes, difficilement contenue par les exigences de l'appartenance aux forces revendiquant leur soutien à Bouteflika, laissera-t-elle des séquelles au lendemain des sénatoriales ? Le couple Fln-Rnd autour duquel s'est construite la majorité présidentielle survivra-t-il à ces rivalités sur fond de compétition électorale ? Connaissant le fonctionnement du système, il y a fort à parier qu'il ne s'agit là que de simples scènes de ménages appelées à s'estomper au gré des arbitrages décidés au niveau des sphères du pouvoir.