La députée FFS a dénoncé la privatisation des entreprises par le biais de l'article 66 ainsi que l'ensemble des mesures qui touchent au pouvoir d'achat des citoyens, qui souffrent déjà de l'inflation et de la dépréciation du dinar. L'article 66 relatif à l'ouverture du capital des entreprises publiques avait été abrogé lors de la réunion de la commission des finances et du budget de l'APN, jeudi soir. La nécessité de l'abrogation de l'article en question a d'ailleurs été motivée par la conviction que cette disposition induisait le lancement de nouvelles privatisations. Cependant, le ministre des Finances est une nouvelles fois monté au front et s'est appuyé sur les dispositions de l'article 61 du règlement intérieur de l'Assemblée populaire nationale (APN) pour introduire un amendement oral qui permettrait, selon lui, de «lever toute ambiguïté quant à l'interprétation de cet article». Le ministre a proposé un article légèrement reformulé stipulant que «toutes entreprises publiques qui réalisent des opérations de partenariat doivent ouvrir leur capital à l'actionnariat national résidant. Celles-ci devront conserver 34% du total des actions ou parts sociales. A l'expiration de la période de 5 ans et après constatation dûment établie du respect de tous les engagements, l'actionnaire national peut lever, auprès du Conseil des participations de l'Etat, une option d'achat des actions détenues par l'entreprise publique». Un coup de force qui a suscité une vive indignation au sein de l'opposition qui digère encore mal la volte-face de la commission des finances et du budget en ce qui concerne la réintroduction de l'article 71 du PLF 2016 — permettant au ministre des Finances de prendre des décrets d'ajustement pour annuler des crédits sans revenir au Parlement — malgré son abrogation en première instance, en contournant clairement le règlement intérieur de l'APN. Seul amendement apporté à l'article 71 : l'obligation faite au ministre des Finances de présenter un exposé annuel sur l'exécution du budget à la commission des finances et du budget. Ainsi, malgré la forte opposition aux deux articles en question, ils ont finalement réussi leur examen de passage grâce à un vote qui en a laissé plus d'un dubitatif quant à l'obtention de la majorité, au milieu de la cohue généralisée qui a laissé libre cours au président de l'Assemblée de trancher. Des dispositions qui ont d'ailleurs été considérées par des élus de l'opposition comme portant l'empreinte des détenteurs de l'argent sale pour les uns, de l'oligarchie pour les autres. L'article 66 ouvre la voie à la privatisation d'entreprises publiques stratégiques. Les parlementaires ont également fortement critiqué un ensemble de dispositions qui portent, selon eux, l'empreinte des milieux d'affaires et qui préparent le transfert des biens de la collectivité au privé. «9 milliards de dollars offerts au FCE» Il s'agit en particulier de l'article 54 relatif à la cession par voie de gré à gré des biens des collectivités, de l'article 59 qui ouvre la possibilité aux opérateurs privés de recourir sous certaines conditions à l'endettement extérieur et de l'article 70 relatif à l'allégement de la règle des 51/49%, ainsi que l'article 62 élargissant la création et la gestion des zones industrielles au privé. Le même consensus a marqué les commentaires de l'opposition à propos des articles 2 et 55 du PLF 2016 relatifs à la levée de l'obligation de réinvestissement des avantages fiscaux dans le cadre des dispositifs de promotion de l'investissement. Ainsi, les députés de l'opposition se disent surpris et outrés des manœuvres entreprises autour de la commission pour «falsifier» les textes sur lesquels on a statué. Ce fut le cas de ces articles où les travaux en commission ont abouti à un maintien partiel de l'obligation d'investissement pour 50% des avantages, avant que ce seuil ne passe à 30% sans la moindre explication. Une «manœuvre» que les parlementaires qualifient de «mépris total pour les lois de la République». Youcef Khebaba, député de l'AAV, a d'ailleurs dénoncé un cadeau de 9 milliards de dollars offert au FCE. Pour sa part, Nadia Chouitem, députée du PT, s'est penchée sur le cas de quelques dispositions particulières, comme les articles 41 et 42 relatifs au régime de l'admission temporaire et à l'allégement des droits de douane sur les intrants destinés à la production de marchandises à exporter qui, dit-elle, risquent d'ouvrir la voie à une nouvelle fuite massive de capitaux. Elle s'est également longuement épanchée sur l'article 46 du PLF 2016 relatif à la hausse de la TVA et à l'instauration de droits de douane sur les couches pour incontinents, qu'elle considère «inhumaine» et comme «une disposition ne servant que les intérêts d'un seul fabricant coopté». Toute l'agitation dont ont fait preuve les élus n'aura finalement permis de faire aboutir que quelques mesures salutaires, comme la levée de l'article 53 relatif à la mutation des droits de concession en cession du foncier dans le cadre des investissements touristiques et l'amendement de l'article 58 spécifiant que seule Sonatrach peut bénéficier de l'exonération de droits de douane dans le cadre des opérations de traitement du pétrole algérien à l'étranger. La classe moyenne fragilisée Si le ministre des Finances s'est montré satisfait de l'aboutissement de son projet de loi, les élus de l'opposition n'ont pas hésité à fustiger un texte qu'ils considèrent «dangereux pour la stabilité sociale». C'est à ce titre que le député du PT, Ramdane Taâzibt, a qualifié de «putsh» la réintroduction d'articles abrogés au préalable par les parlementaires. Il a particulièrement dénoncé l'article 66 du PLF 2016, estimant que cela menace à terme les emplois des citoyens, leurs salaires et leur couverture sociale. Pour sa part, la députée du FFS, Hayat Taïati Meziani, a dénoncé «des actes immoraux et inadmissibles ayant émaillé les travaux de la commission des finances et du budget». «La commission de contrôle s'est transformée en comité de soutien agissant au nom de l'Exécutif», a-t-elle encore déclaré. La députée du FFS a aussi dénoncé la privatisation des entreprises par le biais de l'article 66, ainsi que l'ensemble des mesures qui touchent au pouvoir d'achat des citoyens qui souffrent déjà de l'inflation et de la dépréciation du dinar. Mme Taïati Meziani considère que la LF 2016 risque «de fragiliser la classe moyenne dans la mesure où l'on n'a pas étudié l'impact des augmentations des taxes sur le citoyen».