Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), est consternée par le contenu de l'avant-projet de révision de la Constitution. Une nouvelle loi qu'elle qualifie de «mascarade» et de «dérives graves». Cet avant- projet renferme, selon elle, des amendements superficiels et non des réformes profondes. C'est, pour Mme Hanoune, «un non-sens» et «une honte» pour l'Algérie. «Que vont dire les étrangers ou les ambassadeurs lorsqu'ils auront pris connaissance du contenu de ce projet. Ils vont rire», lâche Mme Hanoune. Scandalisée, la première dame du PT voit dans cet avant-projet de loi des «titres et des slogans», «des aberrations», «des contradictions» et «quelques avancées contrariées». Hier, à l'ouverture des travaux du comité central de son parti à Alger, Mme Hanoune est revenue dans le détail sur les principaux articles introduits dans l'avant-projet de révision de la Constitution. D'emblée, elle critique la nature du système qui, de son avis, ne consacre pas la séparation effective entre les pouvoirs. «Dans ce projet, il n'y a aucun changement par rapport à la nature du régime qui demeure présidentialiste. Notre système n'est ni présidentiel ni parlementaire. Et cela n'est pas fait pour arranger les choses», souligne la conférencière. Outrée, Mme Hanoune ne comprend pas pourquoi le projet parle du renforcement du pouvoir de l'opposition au lieu du pouvoir législatif. «Nous avons revendiqué le renforcement du pouvoir parlementaire. Au lieu de cela, le Président renforce le pouvoir de l'opposition. Ce n'est pas normal, car l'opposition relève d'un autre aspect qui est le multipartisme !», tonne-t-elle. Plus loin, la leader du PT fustige la réintroduction de la limitation des mandats. «En 2008, le président Bouteflika enlève ce verrou et en 2016, ce même Président le remet. C'est grave ! Il est dit que cette démarche fait partie des constantes nationales pour que les gens puissent y croire. Moi, je ne peux pas y croire. J'aurais cru si l'on avait introduit le droit du peuple à la révocabilité. C'est le peuple qui doit décider», lance la conférencière. S'agissant de la disposition portant sur l'officialisation de tamazight, elle estime que la joie des citoyens reste incomplète. «On a précisé que l'arabe est la langue officielle de l'Etat. Mais pour tamazight, rien. Le tamazight est langue officielle, mais de qui ? Du peuple seulement ? Des voisins ?», ironise Louisa Hanoune avant de revenir sur la promotion des dialectes du tamazight prévue dans la Constitution. «Donc, pourquoi ne pas promouvoir aussi les dialectes de l'arabe ? On ouvrira des portes qu'on ne pourra plus refermer», appréhende la SG du PT qui s'interroge, en outre, sur la neutralité de l'institution militaire lors des élections. «Le texte ne fait aucunement référence à ce point, comme il ne parle pas de l'Etat civil. Où est cet Etat civil promis par le président Bouteflika ?» s'interroge Mme Hanoune avant de lancer : «J'ai honte, c'est un bled Mickey (un pays de Mickey).» Dans le nouveau projet, il est fait référence à l'amélioration du climat des affaires : Mme Hanoune est persuadée que cet article sert les oligarques. Pour elle, la constitutionnalisation de la lutte contre la corruption reste un simple slogan. D'ailleurs, dans ce sillage, elle cite le procès Sonatrach et s'interroge : «Est-ce qu'on va ramener ou pas le traître (Chakib Khelil) ?» Enfin, la patronne du PT est convaincue qu'un référendum s'impose pour l'adoption de la révision constitutionnelle. «Si elle passe par les deux Chambres du Parlement, cela voudrait dire que le Président revient en arrière (par rapport aux promesses qu'il avait faites notamment en 2011). C'est le peuple qui doit trancher», assure-t-elle.