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«Créer une université gastronomique»
Rachida Ziouche-Lazrak* chef gastronomique
Publié dans El Watan le 16 - 01 - 2016

Notre art culinaire, c'est notre histoire plusieurs fois millénaire, de la première cueillette à la chasse, à la découverte du feu, à l'agriculture, à la fabrication des outils et ustensiles en terre/ Nos musées conservent quelques traces de cette histoire, mais n'est-il pas temps de faire un véritable inventaire de notre patrimoine culinaire ?
Vous avez étudié la sociologie avant de vous consacrer à la cuisine et devenir chef. Quel lien établissez-vous entre les deux ?
Je peux dire que la cuisine qui était un simple impératif biologique d'alimentation est devenue, au fil des siècles, un fait sociologique et culturel, un élément important de patrimoine, d'identité et de valeurs et, de là, un sujet d'études pour les sciences sociales. Chaque peuple, chaque nation, chaque civilisation a développé des traditions et des cuisines différentes à partir des ressources naturelles locales, mais aussi du caractère de chaque société et de son évolution.
A partir des textes de l'Antiquité ou des objets retrouvés lors de fouilles archéologiques et, plus récemment, grâce à la carpologie**, nous pouvons avoir connaissance de la cuisine des peuples de la préhistoire, de la protohistoire et de l'Antiquité. Les mouvements des peuples à travers l'Histoire ont entraîné des mélanges et des évolutions de la cuisine. Par exemple, la cuisine européenne s'est enrichie des apports de l'Orient à travers les Croisades. Il faut considérer aussi l'apport de l'Andalousie musulmane qui a poussé au raffinement les arts de vivre, dont celui de la table.
La cuisine européenne a été bouleversée aussi par les produits rapportés d'Amérique aux XVe et XVIe siècles. Le standard de cette cuisine n'a pu s'imposer qu'avec la colonisation quasi mondiale à la fin du XIXe siècle. Au XXe siècle, apparaissent ce qu'on appelle les hautes cuisines nationales, de plus en plus concurrentielles, puis à la fin du siècle, les cuisines se sont métissées à partir des apports du monde entier, tandis que les grandes cuisines non européennes ont à leur tour pénétré les pays occidentaux.
La mondialisation a conduit ainsi à des cuisines transnationales avec la consommation alimentaire de masse. A mon avis, la sociologie est une discipline indispensable pour comprendre, analyser et faire évoluer l'art culinaire.
Des pays ont compris cet enjeu et ont créé des universités de gastronomie. Je peux vous dire que c'est le cas du Pérou qui a su faire de sa gastronomie un atout majeur de développent et qui est devenu une destination mondiale de choix. Pourquoi ne pas réfléchir sérieusement à en créer une en Algérie ?
Donc, ce serait en quelque sorte : «dis-moi comment tu manges et je te dirai qui tu es...»
Exactement, et j'ajouterai : «ce que tu seras». Je planche actuellement sur un ouvrage qui, je l'espère, contribuera à apporter quelques éléments sur notre patrimoine culinaire, mais aussi sur les produits de la terre et de la mer qui nous nourrissent.
Du geste délicat qui fait éclater une grenade dans un sillon de blé, lors des semailles, symbole fort d'espoir d'avoir de bonnes moissons à la tendresse avec laquelle on embrasse une belle gerbe de blé vert pour la conduire là où elle sera transformée en poudre de frik avant de finir en chorba dans une authentique marmite en terre et dégustée avec délectation. Tout ce processus me permet de conclure ma réponse par cette phrase d'une consœur italienne : «demain, le gourmet sera le genre humain».
D'après vous, que devient notre tradition culinaire aujourd'hui ?
L'art de bien manger est un art immatériel qui perdure avec une symbolique complexe qui englobe à la fois le sacrifice des animaux (comme lors de l'Aïd El Kebir), les grillades (au commencement était le feu), l'intimité du foyer familial (la fécondité), les cérémonies (le partage)… Il y a toujours «le manger et l'art de le présenter». Notre art culinaire, c'est notre histoire plusieurs fois millénaire, de la première cueillette à la chasse, à la découverte du feu, à l'agriculture, à la fabrication des outils et ustensiles en terre…
Nos musées conservent quelques traces de cette histoire, mais n'est-il pas temps de faire un véritable inventaire de notre patrimoine culinaire comme première étape, puis d'en «codifier» les contenus pour en faire des références à la fois nationales et internationales afin de la préserver, de la mettre à l'abri de toute manipulation ou dénaturation.
Il faut aussi enseigner à la fois la cuisine algérienne et son histoire dans les établissements de formation ;encore faut-il former des personnes en mesure de dispenser ces savoirs et savoir-faire.
Donc, je me répète, créer une université ou une académie gastronomique. A mon sens, le cuisinier doit aller à l'université. Il donne à manger à la société et c'est une chose très sérieuse ! Il faut de plus favoriser les critiques gastronomiques dans les médias, les revues spécialisées de haut niveau, hélas inexistantes, de vrais jurys pour de vrais concours culinaires, loin de toute «folklorisation»…
Votre ouvrage «Ma cuisine passion* proposait une adaptation de ce patrimoine culinaire aux conditions de vie moderne. Comment mener une telle démarche ?
Je vous avoue que j'ai réalisé cet ouvrage en 2013 pour répondre surtout aux besoins des jeunes. Ebranlée par la «malbouffe» qui s'installe dans notre pays et le recours à une cuisine médiocre et «bâtarde» venue d'un peu partout, je me suis lancée dans cette aventure culinaire pour partager une passion, mais aussi un savoir-faire, des idées et contribuer ainsi à cultiver un meilleur goût chez les jeunes.
Vos déboires au Pavillon Algérie de l'expo Universelle de Milan ne vous ont-ils pas découragée ?
Plus que des déboires. C'était un sabotage en règle de plusieurs mois de travail et d'efforts justement pour contribuer à ce travail fabuleux dont j'ai parlé plus haut. Découragée, moi ? Jamais. Ce travail n'est pas perdu. Et je le poursuis.
Justement, qu'y a-t-il au «menu» de votre année 2016 ?
Plusieurs «plats» : un ouvrage avec un premier répertoire de la cuisine algérienne de toutes nos régions, l'expérience de l'Exposition universelle de Milan 2015, l'édition de mon livre Ma cuisine passion en arabe et, pourquoi pas, en tamazight pour peu que des maisons d'édition aient la volonté et les moyens de le faire et quatre livrets thématiques en arabe et en français. 

*La carpologie est la discipline scientifique qui étudie les paléo-semences et les restes alimentaires conservés dans un milieu archéologique (Ndlr).
**Rachida Ziouche-Lazrak. «Ma cuisine passion». Préface : Mohammed Medjahed. Coll. Saveurs et Couleurs. Ed. Arak, Alger, 2012.


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