La «saveur» d'antan, celle de déambuler au milieu des ferblantiers et des «sfandjia», de faire ses emplettes et de prendre un café turc à la Tahtaha, près de l'hôtel de la Montre, est aujourd'hui une image qu'on ne retrouve que dans les récits des vieux Oranais ou sur des cartes postales. Mdina Jdida, un vivier historique de la ville d'Oran, est aujourd'hui l'ombre d'elle-même. «Ya hasrah ! El Mdina s'est vidée de ses habitants. Ouled el bled ont vendu leurs habitations et sont allés quémander leurs destinées ailleurs !» Terrible cette sentence de ammi Kaddour, un vieux propriétaire d'un haouch que les héritiers veulent transformer en petite tour commerciale à étages. «Ils attendent ma mort, je le sais!», dira El hadj Kaddour. Il va fêter ses 82 ans en février et se dirige tranquillement, le pas sûr, vers la mosquée de la zaouia Tidjania, «mesjid» Ben Kabbou, qui date de 1886. Dans cette rue, les démolitions des habitations d'antan, avec des portes, des fenêtres et des balcons de toute beauté, ont donné naissance à des centres commerciaux. En fait, à de petits immeubles laids, qui servent de box pour les divers «beznassa», qui se sont spécialisés dans l'importation d'effets vestimentaires d'Espagne, de France, de Turquie et de Chine. S'il s'avère que Mdina Jdida a toujours été un haut lieu du commerce du textile et de l'or -et un carrefour pour tous les étrangers en quête de travail et de fortune-, depuis la fin des années 80, cependant, le quartier s'est mué progressivement en place d'un commerce sauvage qui a inondé rues et venelles. Conséquence : le quartier Mdina Jdida est aujourd'hui méconnaissable…comme c'est le cas des alentours du marché Sidi Okba, un véritable bijou architectural de style mauresque. Rien n'y fait, les vendeurs à la sauvette se sont fixés en ce lieu et apportent ainsi une autre balafre à ce quartier plus que centenaire qu'on appelait à sa fondation «le village nègre». Aussi, Mdina Jdida, place forte du «goual», des «halqate», des soirées typiquement mauresques dédiées aux veillées de Ramadhan et de Sidna, berceau de Sidi Blel, des artisans et de l'ASMO, phare d'un savoir et d'une identité trempée, n'est donc aujourd'hui qu'un nom perdu dans les annales de l'histoire.