Le parquet de Laghouat a requis, mercredi, une amende de 500 000 DA à l'encontre du militant de la cause des chômeurs, Belkacem Khencha. Pour rappel, cet infatigable activiste est poursuivi pour une interview accordée à El Watan Week-end dans son édition du 11 septembre 2015, dans laquelle Khencha est revenu sur les conditions de détention dans cette ville du Sud. Un témoignage courageux donné quelques semaines seulement après sa libération. Khencha et six membres de son mouvement ont été condamnés à six mois de prison ferme pour avoir organisé, fin janvier 2015, un rassemblement de soutien en solidarité avec un autre chômeur, Mohamed Reg, qui, lui, encourt la peine d'une année et demie de prison. Pour Me Farouk Slimani, l'un des trois avocats de Khencha qui ont fait le déplacement mercredi à Laghouat, le procès s'est déroulé dans de «très bonnes conditions». Un avis partagé par Me Noureddine Ahmine, qui affirme que la justice «a tout fait pour éviter de donner une autre dimension à l'affaire en lui épargnant la prison». «Le juge, qui considère que les déclarations de Khencha sont d'une extrême gravité, a évoqué l'absence de preuves avérées», souligne-t-il. Au final, Khencha est aujourd'hui sur le banc des accusés pour avoir déclaré que «les gardiens s'en prenaient à ceux qui se bagarraient ou réclamaient l'amélioration de leurs conditions de détention. Ils tiennent le prisonnier, la tête en bas, suspendu par les pieds avec une ceinture. Au moment où les uns lui coincent les épaules, les autres le frappent sur le plat des pieds pour ne laisser aucune trace. C'était leur façon de punir. J'ai eu des témoignages de gens qui se sont fait menotter pour être giflés par les gardiens à tour de rôle.» «Tout va bien !» Dans une édition précédente, Me Ahmine a révélé que c'est «le ministère de la Justice» qui a envoyé la copie de l'interview à la justice de Laghouat. Le but du ministère étant, selon l'avocat, de vérifier les propos de Khencha qui dénonce des pratiques interdites par la loi. Sauf que, seuls Khencha et ses ex-codétenus ont été entendus aux côtés d'autres prisonniers. Me Abdelghani Badi révèle que les autres détenus auditionnés ont tous témoigné positivement sur les conditions de détention dans cet établissement. «A part Khencha et ses amis, les autres ont tous dit : tout va bien !» affirme Me Badi. La justice n'a donc pas jugé utile d'auditionner les responsables de l'établissement pénitentiaire, ce qui «n'est pas normal», dit Me Ahmine. L'enquête réalisée par la justice était superficielle, selon Me Badi. «Nous regrettons que l'Algérie n'ait pas encore signé l'accord international qui permet aux organisations non gouvernementales et aux ligues des droits de l'homme de faire des visites dans les différentes prisons algériennes.» Me Ahmine considère que l'amende requise est «exagérée». «La nature de l'accusation ne s'applique aucunement aux responsables et travailleurs de l'établissement qui ne sont pas considérés aux yeux de la loi comme corps constitué», assure-t-il. Le jugement final sera rendu le 17 février prochain.