Le moudjahid Maurice Baglietto, décédé dimanche dernier à Alger, sera enterré aujourd'hui à 14h au cimetière chrétien de Kouba. Né le 23 mai 1925, cet enfant du quartier de Belcourt, aujourd'hui Belouizdad, dans la capitale, s'est engagé très tôt dans les luttes syndicales. Fils d'un comptable membre du Parti communiste algérien (PCA), il rejoint à 16 ans les jeunesses communistes. Tourneur ajusteur, il adhère à la CGT et tout naturellement entre au PCA en 1945, suivant, sans doute, ainsi les pas de son père. Tout au long de son enfance et de son adolescence, il a fréquenté les jeunes Algériens, les «indigènes» de son quartier comme on les appelait à l'époque. C'est ainsi qu'il a pris conscience de la condition de colonisés de ses amis et condisciples de Belcourt, ce quartier populaire malgré tout et où cohabitaient plusieurs communautés aux côtés des Algériens regroupés autour des «halles centrales» des fruits et légumes d'Alger et jusqu'aux hauteurs de Sidi M'hamed. «Momo», comme on le surnommait, avait pour habitude de répéter à propos de cette période, qui a marqué profondément son existence et qui fût déterminante pour son parcours de militant et de nationaliste : «On a grandi ensemble, travaillé, galéré, manifesté ensemble.» Après le déclenchement du 1er Novembre 1954, il ne pouvait rester en marge du combat libérateur, c'est pour son engagement et son militantisme nationalistes qu'il sera incarcéré au camp de Lodi près de Médéa. C'est là qu'étaient enfermés sans procès ni jugement, sur simple décision administrative, tous les pieds-noirs soupçonnés de sympathie pour la cause nationaliste. Il y rencontre notamment Albert Smadja, l'avocat de Fernand Iveton guillotiné par l'administration coloniale pour avoir déposé une bombe dans la centrale électrique d'Alger, arrêté deux jours à peine après l'exécution de son client. Et bien d'autres militants comme Henri Alleg, par exemple, directeur du journal Alger républicain, arrêté et torturé par les parachutistes français de la sinistre 10e DP à la villa Susini. Quelques mois avant l'indépendance, il est expulsé vers la France, par l'administration coloniale. Après le 5 juillet 1962, il quitte Marseille avec sa famille pour revenir en Algérie retrouver son pays, son emploi à la brasserie d'Alger et sa passion pour les abeilles. Il a en effet découvert son intérêt pour l'apiculture avant son exil forcé. Une passion qui ne le quittera plus, même durant les terribles années noires du terrorisme au cours desquelles outre son engagement aux côtés des Patriotes de la Mitidja, il continuera à s'occuper de ses 80 ruches. Depuis son retour, il s'est engagé avec la même passion dans le militantisme et l'action politique, notamment au sein du Parti de l'avant-garde socialiste (PAGS), du MDS en passant par Ettahadi. Son décès intervient quelques jours après la commémoration «officielle» ratée de la mémoire du chahid Henri Maillot à Alger par l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM). Comme ce fût le cas pour celle de Fernand Iveton dans les années 1980 du temps du parti unique.