Les établissements du secondaire d'Alger seront paralysés durant toute la journée de mardi. Deux syndicats autonomes, en l'occurrence le Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) et le Conseil des lycées d'Alger (CLA), ont décidé, contre toute attente, d'organiser une journée de protestation. Une grève qui touchera plus particulièrement les 113 lycées que comptent Alger et sa périphérie. Les animateurs de ce débrayage estiment que cette démarche est la seule alternative pour dénoncer les décisions « injustes » prises par Mme Younsi, inspectrice de l'académie d'Alger-Ouest et cautionnées par le ministère de l'Education nationale. Contactée, Mme Younsi dément catégoriquement avoir lésé une quelconque personne. « D'abord, la décision émane du ministère et celle-ci a été prise avec le consentement des concernés », a soutenu avec insistance Mme Younsi. Concrètement, de quoi s'agit-il ? Le problème qui se pose mérite-t-il la paralysie des lycées ? Selon les membres du bureau du Cnapest, Mme Younsi a engagé des sanctions disciplinaires de mutation d'office contre sept enseignants et trois adjoints d'éducation, deux secrétaires et un chargé de l'orientation au niveau du lycée Saïd Hamdine de Hydra. Les représentants des deux syndicats jugent que derrière les affectations d'office se cachent de véritables déportations administratives. « Les enseignants du lycée Saïd Hamdine ont manifesté à plusieurs reprises leur mécontentement contre les agissements de la directrice de cet établissement et, malheureusement, ce sont eux qui ont été sanctionnés. Nous sommes persuadés que le lycée Saïd Hamdine est pris comme exemple pour casser toute contestation dans les lycées à l'avenir et avaliser les mutations arbitraires », expliquent les initiateurs du mouvement de protestation. Ces derniers pensent que le département de M. Benbouzid a cautionné cette sanction collective de grande envergure parce qu'il veut faire payer aux enseignants du secondaire leur engagement syndical et ce, tout en risquant d'envenimer le climat dans les lycées en accentuant le mécontentement des enseignants. « Affectations revanchardes » Le recours à la grève, de l'avis du CLA et du Cnapest, a pour objectif principal de dénoncer ses affectations qualifiées de revanchardes et de montrer leur refus quant à l'arrogance et le mépris affichés envers les enseignants par les hauts responsables. « Nous considérons injuste et illégale la décision prise par la première responsable de l'académie. Celle-ci n'a même pas pris le soin de consulter les membres de la commission paritaire qui est normalement chargée de trancher sur ce genre de cas », a affirmé M. Lemdani du Cnapest, qui souligne qu'il est impérativement nécessaire de réagir contre ces mutations vexatoires des enseignants et des travailleurs contre leur gré. D'après les syndicalistes, le ministère de l'Education nationale couvre ses attaques contre les enseignants par une interprétation inapropriée du décret exécutif n° 394-05 du 9 octobre 2005 qui permet la gestion du mouvement des enseignants. Ce degré, soutiennent les syndicalistes, malgré son ambiguïté n'assimile pas une sanction du 3e degré à une affectation pour nécessité de service. Les syndicats interpellent l'inspectrice de l'académie de surseoir à cette décision qui est, selon eux, contraire aux textes de l'Unesco relatifs au contrat pédagogique, ainsi qu'aux conventions internationales relatives à l'activité syndicale et le droit de grève. Par ailleurs, Mme Younsi est revenue dans le détail sur le problème qui a secoué durant une année le lycée Saïd Hamdine. « Le lycée était déstabilisé depuis l'année dernière à cause des griefs liés au départ de la directrice. Pour le règlement du conflit, j'ai invité avant la fin de l'année les concernés et nous avons discuté à bâtons rompus. L'année s'est terminée sans incident », explique l'inspectrice qui affirme que le conflit a ressurgi lorsqu'il était question de débattre au début de l'année scolaire du projet de l'établissement lequel donne des prérogatives aux directeurs des lycées. Les enseignants ont alors déposé un préavis de grève le 14 septembre et ont entamé leur débrayage deux jours après. « J'ai reconvoqué les enseignants et nous avons discuté pendant 10 heures. J'ai relevé l'arrogance et la violence dont ont fait preuve certains enseignants de ce lycée », a souligné Mme Younsi, qui a affirmé, en outre, que la directrice de l'école a subi deux enquêtes qui n'ont révélé aucune faute professionnelle et aucun dépassement de sa part dans la gestion de l'établissement. Face à cette situation, l'inspectrice était obligée de porter le problème au ministère de tutelle, lequel a convoqué les deux parties en conflit. La directrice de l'école a, pour éviter de plus en plus de souffrance au lycée Saïd Hamdine, accepté de quitter l'établissement et d'être à la disposition du ministère, mais à condition que les contestataires partent également. Ces derniers ont accepté à leur tour la proposition. « Je ne comprends pas pourquoi ce revirement de la situation. Toutefois, en dépit de cela, j'ai demandé aux enseignants de rejoindre leur nouveau poste de travail, tout en leur promettant d'étudier les dossiers au cas par cas », dira Mme Younsi. L'objectif de cette dernière est d'éviter aux lycéens davantage de retard dans leur cours. Ce lycée, de son avis, souffre depuis des années et il fallait mettre un fin à l'anarchie. « La décision de muter les enseignants a été prise par les autorités et ils ne sont en aucune manière injustement touchés. Nous avons pris la décision de consulter la commission paritaire qui, généralement, se prononce sur la forme et non sur le fond », a expliqué notre interlocutrice.