Les dirigeants de la Corée du Nord persistent et signent, tandis que la communauté internationale confirme l'essai nucléaire de lundi. Telle est la situation au plan international avec des conclaves sans conclusion à l'image du Conseil de sécurité des Nations unies réuni en urgence mais sans grand résultat. Une nouvelle réunion des cinq membres permanents de l'instance onusienne était prévue hier, mais, selon les observateurs la Corée du Nord, ne court pas le risque de connaître une situation pire que celle qu'elle connaît actuellement. C'est-à-dire une crise financière et aussi un risque de famine. C'est pourquoi la Corée du Nord s'est montrée insensible aux condamnations internationales de son essai qu'elle sait sans suite ou de simple circonstance. Et elle entend aller plus loin et elle le fait savoir. Un responsable nord-coréen a, en effet, averti que son pays pourrait tirer un missile à tête nucléaire si les Etats-Unis refusaient de faire des concessions. « Nous espérons un règlement de la situation avant que nous lancions un missile à tête nucléaire. Tout dépend de la réaction des Etats-Unis », a déclaré un responsable nord-coréen non identifié. Le responsable a souligné que l'essai nucléaire annoncé lundi par Pyongyang est « l'expression de notre intention de faire face aux Etats-Unis à une table des négociations ». Il a assuré que Pyongyang était prêt à abandonner ses programmes nucléaires et reprendre les pourparlers multipartites à ce sujet « seulement si les Etats-Unis prennent des mesures correspondantes ». Toutefois, a-t-il ajouté, « nous n'avons plus rien à perdre. Les sanctions ne sont pas une solution ». Le Conseil de sécurité de l'ONU devait se réunir hier pour discuter d'un projet de résolution prévoyant des sanctions contre Pyongyang. « Nous avons toujours l'intention de renoncer à nos programmes nucléaires et de rejoindre les négociations à six », a ajouté le responsable. Les pourparlers à six pays (les deux Corées, les Etats-Unis, la Chine, le Japon et la Russie) tentent depuis 2003 de convaincre le Nord de renoncer au nucléaire. Pyongyang les boycotte depuis novembre 2005, posant comme condition sine qua non la levée des sanctions financières imposées par les Etats-Unis à son égard. En procédant à son premier essai nucléaire, qui pourrait être suivi par d'autres, le régime nord-coréen cherche à renforcer sa position face aux Etats-Unis, estiment des analystes. « Pyongyang a dû juger qu'il serait mieux de négocier en position de force, en tant que puissance nucléaire », commente le professeur Kim Yeon-Chul, de l'université de Corée. Le régime a « apparemment décidé de procéder à un essai nucléaire après l'absence de réaction des Etats-Unis à ses menaces précédentes », souligne-t-il. De nombreux observateurs notent en effet le crescendo des actes de Pyongyang depuis l'arrivée au pouvoir de George W. Bush et l'aggravation des tensions qui a suivi. Le Nord s'est d'abord retiré du Traité de non-prolifération (TNP) nucléaire, puis a extrait du combustible irradié d'un réacteur, avant de procéder au tir d'essai de sept missiles, puis enfin à cet essai nucléaire annoncé lundi. Chaque étape avait pour but de contraindre les Etats-Unis, dans un premier temps, à accepter un dialogue bilatéral, puis par la suite à lever les sanctions financières imposées en septembre 2005 à des entités du Nord accusées de blanchiment d'argent. A chaque « acte de provocation », des mesures de représailles ont été prises contre Pyongyang, mais, à chaque fois, le régime les a ignorées. Ce sera la même chose si le Conseil de sécurité de l'ONU décide de sanctions contre le Nord. La Corée a déjà répondu hier à ces menaces en annonçant son intention de lancer un missile. Et sa riposte, si cela peut être appelé ainsi, montera elle aussi en cadence. « La Corée du Nord va sortir une nouvelle carte, comme des menaces de transférer de la technologie nucléaire ou des tirs d'essai de missiles qui peuvent transporter des ogives nucléaires », dira à ce sujet Cheon Seong-Whun, chercheur à l'Institut coréen pour l'unification nationale (public). Au plan international, un projet de résolution basé sur le fameux chapitre sept de la Charte de l'ONU, mis en circulation par les Etats-Unis « condamne le test nucléaire », « exige le retour immédiat et sans préconditions de la Corée du Nord aux pourparlers à six » et son « retour au sein du Traité de non prolifération nucléaire (TNP) et aux garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ». Il exige également « l'abandon par Pyongyang de son programme d'armement nucléaire et de ses programmes nucléaires ». Les Américains sont partisans de sévères sanctions. Le secrétaire d'Etat adjoint américain, Christopher Hill, négociateur dans le dossier nucléaire nord-coréen estime qu'elles devront faire « vraiment mal ». Très attendue sur cette question, la Chine s'y est montrée hier prudente demandant des « mesures appropriées ». « Nous pensons que le Conseil de sécurité doit prendre des mesures appropriées, mais toute action doit conduire à obtenir une péninsule coréenne dénucléarisée grâce à des efforts diplomatiques, au dialogue et à des consultations », a déclaré le porte-parole des Affaires étrangères, Liu Jianchao. « Tous les efforts doivent favoriser la stabilité dans la péninsule (...) et la reprise des pourparlers à six », a ajouté M. Liu. La Chine, qui reste le principal soutien de la Corée du Nord, n'a jamais été en faveur de sanctions contre son voisin. Mais Pékin a exprimé hier d'autres préoccupations, comme du reste d'autres pays à travers le monde qui s'inquiètent de la course aux armements et encore plus du traitement toujours au cas par cas. Ainsi vont les affaires de ce monde.