Notre maison est de verre», lançait Abdelaziz Bouteflika à son retour au pouvoir en 1999. Ce vœu de transparence risque d'être relativement exaucé, mais ce ne sera pas le fruit d'un effort interne et de l'assainissement de la gouvernance nationale. L'onde de choc de l'opération Panama Papers, révélant un scandale d'évasion fiscale impliquant des chefs d'Etat et des personnalités du monde, aura des répercussions sous différentes formes : politiques, judiciaires ou sociales, selon le système politique des pays concernés. En Algérie, où la vie nationale est plus proche de l'ère glaciaire de la politique que de la démocratisation, on ne devrait pas s'attendre à un emballement dans les palais de justice ou à la mise en branle des instruments de contrôle. On a vu, il y a quelques jours, que le régime était prêt à remplacer le système judiciaire par le réseau des zaouïas après la mise au ban brutale de quelques procureurs trop entreprenants. On assistera, en revanche, à de probables réaménagements au sein du sérail qui tentera d'adapter sa stratégie et de résorber ce nouveau coup dur venant de l'étranger. Deux semaines après le dernier Conseil restreint consacré à la sécurité nationale et auquel le ministre de l'Industrie était convié, promettant ce dernier à des fonctions autrement plus stratégiques, le plan de répartition du pouvoir va devoir connaître de notables réajustements. L'apparition du nom de Abdessalem Bouchouareb dans l'affaire des sociétés offshore impliquant, entre autres, les proches du Président de la Russie, un pays connu pour le poids des oligarques, va infliger quelques fissures à l'armature du système en place qui découvre que le règne de l'autoritarisme n'est pas un long fleuve tranquille. A l'ère du village global et des fuites de données planétaires, les soupçons ou les accusations formulés intra muros contre les puissants du moment peuvent trouver une retentissante confirmation dans les plus grands supports médiatiques du monde. La patronne du Parti des travailleurs n'aura pas besoin d'élever la voix pour être entendue au sujet des dérives oligarchiques du régime, lequel commet une embardée supplémentaire en mettant un pied dans le monde opaque de la finance offshore. De désillusions en scandales et d'échecs en faillite, les Algériens finissent par apprendre que le premier cercle du pouvoir a acquis la science d'héberger ses avoirs dans les derniers paradis fiscaux dans le monde. Et l'on s'interrogera fatalement sur la nature et les mœurs financières des nouveaux empires économiques nés et encouragés ces dernières années pour casser de supposés monopoles dans le secteur industriel. La crise politique interne s'aggravera avec ce nouveau revers récolté sur la scène internationale, écornant un peu plus l'image du pays. Le peuple, incidemment pris à partie avant-hier par un homme politique de l'opposition, sans doute fatigué par les conclaves, pourra se faire une idée plus précise sur les hommes qui sont en charge du destin national. Si la maison de verre se révélait n'être qu'un château de cartes au sommet, la chute risque d'être dramatique.