La présidente Dilma Rousseff est accusée d'avoir maquillé des comptes publics en 2014, année de sa réélection. Les députés brésiliens ont voté dimanche en faveur de la destitution de la présidente de gauche Dilma Rousseff. Le camp de la destitution l'a emporté par 367 voix, 25 de plus que les 342, soit les deux tiers des voix requises pour autoriser le Sénat à mettre en accusation Mme Rousseff. En effet, la présidente Rousseff est accusée de maquillage des comptes publics en 2014, année de sa réélection, et en 2015 pour masquer l'ampleur de la crise économique, Mme Rousseff nie avoir commis un crime dit «de responsabilité» et dénonce une tentative de «coup d'Etat» institutionnel. D'ici le 11 mai, il suffira d'un vote à la majorité simple des sénateurs pour qu'elle soit formellement mise en accusation pour «crime de responsabilité» et écartée du pouvoir pendant 180 jours au maximum, en attendant un verdict final. Pour l'opposition de droite, il s'agit d'un «crime de responsabilité», un des motifs prévus par la Constitution de 1988 pour la destitution du chef de l'Etat. Le vice-président Michel Temer, son ex-allié centriste et aujourd'hui rival, assumerait alors ses fonctions et formerait un gouvernement de transition. Héritière politique de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, Mme Rousseff est entrée dans l'histoire en 2011, en devenant la première femme présidente du Brésil. Sa défaite s'est dessinée fin mars quand le parti centriste PMDB du vice-président Temer a claqué la porte de sa coalition, imité la semaine dernière par les autres partis centristes de sa base hétéroclite. Le 2 décembre 2015, le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha, a accepté une demande de destitution lancée par l'opposition de droite contre Mme Rousseff pour «maquillage des comptes publics». Sachant que lui-même est inculpé de corruption et blanchiment d'argent dans le cadre du scandale Petrobras. Le 11 avril, une commission spéciale de 65 députés a approuvé, par 38 voix contre 27, un rapport recommandant aux députés de voter en faveur de l'ouverture d'un procès en destitution de la présidente devant le Sénat. La présidente Rousseff a demandé en vain au Tribunal suprême fédéral (STF) d'annuler la procédure. Réélue de justesse en octobre 2014 et affaiblie par un scandale de corruption au sein de la société Petrobras, Dilma Rousseff a fait des concessions à l'opposition de droite en acceptant de collaborer avec son élite économique et de revoir à la baisse les budgets sociaux. Ainsi, elle a perdu une partie de sa base de gauche. Démocratie de la corruption ou corruption de la démocratie ? Avec 28 partis qui siègent à l'Assemblée, même un Président élu à une large majorité se verrait contraint à des négociations perpétuelles pour se bâtir une base parlementaire et la maintenir tout au long de son mandat. Début octobre 2015, Mme Rousseff est allée jusqu'à offrir des ministères supplémentaires au PMDB dans l'espoir de voir ses membres bloquer le processus de destitution au Parlement. Abandonnée par le Congrès, Mme Rousseff peut de moins en moins compter sur le soutien des mouvements sociaux, hostiles à sa politique d'austérité budgétaire et à son rapprochement avec les forces libérales du pays. Sachant que son prédécesseur Lula da Silva a toujours évité d'affronter le Congrès pour lui imposer des réformes qui s'opposent aux intérêts des magnats de la finance, de l'industrie, de la presse, entre autres. Ils y sont très nombreux et forment des lobbys puissants. Le nom du vice-président Temer, qui remplacerait Mme Rousseff si elle était destituée, dirigeant du parti centriste PMDB qui a lâché la majorité fin mars, a été cité par des inculpés du dossier Petrobras. Aussi, sur les 65 membres de la Commission spéciale qui a recommandé de voter «pour l'impeachment», 36 sont inculpés ou ont déjà été condamnés. Elu président en 1990, Fernando Collor de Mello est accusé de corruption passive. Il a bénéficié de 6,5 millions de dollars. Il a fini par démissionner avant sa condamnation par le Sénat, le 30 décembre 1992. Il a perdu ses droits politiques pour huit ans, mais en 1994, son procès pour corruption est «classé» par le STF. Revenu en politique, il est élu sénateur d'Alagoas (nord-est) en 2006 et réélu en 2014. Aujourd'hui, il est rattrapé par le scandale de corruption Petrobras.