Ce que la justice italienne tente de connaître depuis 5 ans, les Panama Papers l'ont révélé cette semaine. Les sociétés offshore ont des connexions directes avec le scandale de corruption qui a touché Sonatrach. Les liens semblent désormais bien établis. Les premières informations données par le journal Le Monde décrivaient déjà avec des détails déconcertants les succursales de l'offshore de Farid Bedjaoui, Réda Hemch, neveu de l'ancien ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil et Omar Habour, un homme d'affaires natif de Oujda (Maroc), très proche de la famille Khelil, des intermédiaires cités dans le scandale de corruption Sonatrach 2, dont le procès est en cours à Milan, en Italie. Ils auraient tous continué à nier leur implication — comme ils l'ont toujours fait, comme le fait encore Chakib Khelil depuis son retour en Algérie — dans les graves faits de corruption qui leur sont reprochés dans l'affaire Sonatrach 2. Les révélations des Panama Papers ont dû être ressenties comme une déflagration faisant éclater la vérité et mettant surtout entre les mains de la justice des informations précieuses sur les ramifications panaméennes du scandale Sonatrach. Farid Bedjaoui avait ouvert une multitude de sociétés offshore et c'était sur le compte de l'une d'elles, Pearl Parteners Ltd, que Saipem — filiale du géant pétrolier italien Eni, qui a bénéficié de plusieurs marchés en Algérie, d'une valeur de 11 milliards d'euros en quatre ans (2007 et 2011) — a versé près de 200 millions d'euros. Une somme qu'a reconnue l'avocat de Farid Bedjaoui, il y a quelques jours, mais tout en disant que ce sont «les rémunérations légales de son client». Selon Le Monde, une partie de cette somme a transité par une autre société offshore appartenant à Farid Bedjaoui, qui détient des comptes à la banque privée Edmond de Rothschild SA à Genève, pour atterrir sur un compte de Réda Hemch, chef de cabinet de l'ancien Pdg de Sonatrach du temps où Chakib Khelil était en fonction. Le virement, selon la même source, était de 1,7 million d'euros. Quant à Omar Habour — associé avec Farid Bedjaoui et cité dans l'affaire Sonatrach-Saipem, qui possède avec Chakib Khelil une propriété au Maryland —, il aurait reçu 30 millions d'euros. C'est ce même Omar Habour qui a bénéficié en 2007 d'un transfert des pouvoirs au sein des deux sociétés offshore (Carnelian Group Inc. et Parkford Consulting Inc.) créées en 2005 par le cabinet panaméen Mossak Fonseca pour le compte de Najat Arafat, l'épouse de l'ancien ministre de l'Energie et des Mines. Etonnante connexion et surprenante liaison dont se défend Chakib Khelil sur les plateaux d'une chaîne de télévision privée en Algérie. Pourquoi alors un tel recours massif aux sociétés offshore si ce n'est pour dissimuler de l'argent ? Selon le site algériepatriotique qui affirme être en possession de documents, Omar Habour a «alimenté le compte bancaire que Mme Najat Khelil détient auprès de la Sun Trust Bank, dont le siège est à Atlanta, dans l'Etat de Georgie, sous le numéro 1000083535459, à hauteur de 1 421 000 dollars entre 2008 et 2009». «Un autre compte, portant le n°1000063572985, détenu dans la même banque et géré également par Omar Habour en sa qualité de ‘fondé de pouvoir', a été crédité de la somme de 1 900 000 dollars, à partir de ses nombreuses sociétés-écrans créées pour dissimuler ces transactions financières», ajoute la même source. Les révélations de ce journal vont encore plus loin, donnant des détails sur les comptes de l'ancien ministre de l'Energie lui-même, qui détient «un compte commun avec son épouse qui a été provisionné à hauteur de 1 400 000 dollars entre 2004 et 2011». Il est aussi, indique algériepatriotique, «détenteur du compte n°446020576724 auprès de Bank of America, la plus grande banque américaine en termes de dépôt et de capitalisation boursière, d'un deuxième à la Bank Fund Staff Federal Credit, sous le n°4385600000973754, et d'un troisième à Chevy Chase Bank, dont le siège est au Maryland, numéroté 348301901». Algeriepatriotique indique que «d'autres sommes autrement plus importantes et émanant d'autres sources ont été virées sur d'autres comptes». A en croire ces graves révélations, le réseau de corruption qui a touché Sonatrach est en passe d'être remonté. Avant son limogeage, l'ancien ministre de la Justice, Mohamed Charfi, parlait d'«un véritable réseau de corruption international dont les tentacules s'étendent à tous les continents».