Comme chaque année, l'examen du baccalauréat est entaché d'irrégularités et les Algériens ne s'en étonnent pas et ne s'en émeuvent plus. Malheureusement, 2016 a pris un autre aspect. Il ne s'agit plus d'élèves qui trichent, d'une petite fraude, mais d'une véritable fuite des sujets organisée par une ou plusieurs personnes installées dans les hautes sphères du ministère de l'Education nationale, selon des professeurs de l'enseignement contactés par nos confrères. Cela rappelle la fuite massive qui a eu lieu en 1992, à l'époque où Ali Benmohamed était en charge du secteur. Il a d'ailleurs été contraint de démissionner à la suite de ce scandale. Les malfaiteurs qui ont fait sortir les sujets d'examen veulent-ils faire subir le même sort à Nouria Benghebrit ? Depuis sa désignation à la tête du ministère, cette grande dame subit les foudres des islamo-baâthistes. Cette spécialiste de la pédagogie, qui a beaucoup travaillé dans des institutions internationales comme l'Unesco par exemple et à laquelle Ban Ki-moon, secrétaire général de l'ONU, a exprimé ses félicitations et proposé son aide, a découvert «une école sinistrée», selon un constat fait par feu Mohamed Boudiaf quand il était à la tête du HCE. Non seulement elle abrutissait les élèves — surtout les plus pauvres qui n'avaient pas les moyens de prendre des cours de rattrapage — parce qu'elle leur faisait perdre tout esprit critique, mais elle poussait certains d'entre eux dans les griffes des charlatans islamistes qui les orientaient vers la violence. Elle développait surtout l'intolérance et le rejet de tous ceux qui ne cédaient pas à l'obscurantisme. Parce qu'elle était déterminée à combattre tous ces phénomènes, Mme Benghebrit a été victime d'une campagne mensongère, accusée, entre autres, de vouloir porter atteinte «aux constantes nationales» et au caractère «arabe» de l'Algérie. Benmohamed lui-même s'est associé à l'opération de dénigrement avec, par exemple, le chantre de l'arabisation, Athmane Saadi, lequel, cependant, n'a pas envoyé ses enfants à l'école algérienne, mais à Londres. La ministre était consciente d'avoir affaire à des gens qui s'accommoderaient bien d'un pays géré par Daech ou AQMI et où l'on brûlerait vive une femme parce qu'elle refuse d'épouser le premier venu comme on le voit au Pakistan ou au Bengladesh et qu'on interdirait à la femme de conduire sa voiture et de se promener librement, comme chez les wahhabites. C'est pourquoi Mme Benghebrit avait décidé de relever le défi et de créer une école en phase avec le siècle pour ancrer définitivement l'Algérie dans la modernité. De ce fait, elle est devenue la femme à abattre pour les taliban algériens qui veulent remplacer la médecine par la rokia, la science par le maraboutisme. Et dire que l'islam a donné à l'humanité Ibn Sina et Ibn Rochd.