L'exposition «Les 80» qui s'ouvre aujourd'hui à l'Espace d'art contemporain d'El Achour regroupe des œuvres de six artistes représentatifs d'une génération. Celle des années 80' du siècle dernier. Zoubir Hellal, Arezki Larbi, Akila Mihoubi, Malek Salah, Mustapha Nedjaï et Mostafa Goudjil. Il s'agit de plasticiens, nés pour la plupart durant les années 50', qui ont émergé comme une «deuxième génération» durant les années 80' alors que la légende des pionniers (Issiakhem, Khadda, Baya…) était déjà faite. Nos six peintres ont donc fait leurs armes dans «l'ombre et la lumière» de leurs prestigieux aînés, comme le dit justement la présentation. L'influence est bien là, mais les enjeux esthétiques (et politiques) ont évolué. La présence par exemple des formes et des signes de notre patrimoine algérien n'est plus là pour signifier une revendication de l'identité face à sa négation coloniale, mais comme un élément naturel de l'imaginaire de l'artiste et de son public. Zoubir Hellal, commissaire de l'exposition, note par ailleurs «un retour à la peinture qui revalorise le geste pictural» durant ces années 80'. L'objet de cette exposition collective n'est surtout pas de développer la nostalgie d'une période passée, mais d'éclairer un moment charnière de l'évolution des arts visuels (dans une évolution globale des arts accompagnant les bouleversements sociaux, politiques et économiques) en Algérie en invitant des artistes dont l'œuvre continue à s'étoffer. Les organisateurs ont d'ailleurs privilégié des œuvres récentes, voire inédites, comme pour dire que ces artistes sont aussi des artistes d'aujourd'hui. Qu'ils réinterprètent l'héritage culturel algérien (à l'image de Goudjil avec l'enluminure, ou Hellal avec les tapis traditionnels) et international (Nedjaï redessinant Hokusai) ou qu'ils usent de collages (Arezki Larbi et Akila Mihoubi), nos artistes recollent de façon inédite les morceaux de notre imaginaire collectif pour en faire des créations originales et produire du jamais-vu sur du déjà-vu. Si cette génération des années 80' ne s'est pas présentée en casseurs d'idoles, elle a néanmoins amorcé un rapport différent à l'œuvre d'art et à l'artiste. «Contrairement à leurs aînés qui sont devenus des mythes, autant par leur admirable travail que par les effets d'une nostalgie bien de chez nous, il est à prévoir qu'ils n'en deviendront jamais. Mais justement, leur création s'est toujours attachée à démythifier. En cela, ils sont pleinement de leur temps qui n'est pas achevé», écrit Ameziane Ferhani dans la présentation de l'exposition. En à peine une année d'existence, l'Espace d'art contemporain d'El Achour se distingue manifestement par la qualité et la régularité de sa programmation. Côté expositions, l'espace affiche une certaine diversité entre des artistes confirmés comme Malek Salah et de jeunes plasticiens déjà affirmés tels Adlene Samet. En plus de la galerie, l'espace propose également des ateliers d'initiation à différentes disciplines. Et quasiment chaque samedi, hors jours de vernissage, se tient la Lettre du Débat. Il s'agit de rencontres riches en échanges autour des questions qui touchent au monde des arts avec la participation d'acteurs de la scène culturelle. Plusieurs raisons donc de visiter l'exposition «Les 80» qui s'ouvre aujourd'hui à l'Espace d'art contemporain d'El Achour.