L'action syndicale a débordé hier à Tizi Ouzou sur les voies à grande circulation. Les travailleurs de la Cotonnière de Tizi Ouzou (CTO, ex-Cotitex), ont investi pendant plusieurs heures l'autoroute à l'entrée de Draâ Ben Khedda, près du site de l'entreprise, à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de wilaya. Les engagements pris au début de la semaine par la SGP-IM (industries manufacturières), au sujet du paiement des salaires, n'ont pas été tenus jusqu'à hier. Lors de la réunion de dimanche dernier à Alger entre les syndicalistes de la CTO et les représentants de la SGP, il a été décidé « le versement à titre exceptionnel d'un mois de salaire avant la fin du mois de Ramadhan ». Ne voyant rien venir, les travailleurs ont décidé hier matin d'investir la route nationale pour attirer l'attention des pouvoirs publics. La circulation automobile a été coupée jusqu'en début d'après-midi et ce sont les services de sécurité qui ont ouvert les premiers pourparlers avec les protestataires avant que les autorités ne manifestent leur disponibilité à prendre en charge immédiatement la revendication des travailleurs. « Nous n'avons reçu que des miettes depuis juillet dernier. Nous avons passé le Ramadhan avec une avance de 3000 DA. Si on ne se manifeste pas, on passera aussi l'Aïd sans aucun centime », fulminent les travailleurs. De nouveaux engagements ont été pris dans l'après-midi d'hier pour payer les 1031 travailleurs de l'entreprise, suite à des contacts entre l'union de wilaya de l'UGTA, la SGP et la direction régionale de la banque. « Nous avons été obligés de bloquer la route, car nous n'aurions été reçus ni entendus par aucune autorité », s'insurge-t-on à la section syndicale. Les travailleurs devront être payés aujourd'hui, selon les assurances faites aux syndicalistes. Ceux-ci dénoncent le « mépris » rencontré lors de leurs démarches afin d'assainir la situation de l'entreprise et permettre la relance de son activité, seul moyen de garantir la régularité dans le paiement des salaires. « Nous avons un plan de charge qui peut faire fonctionner l'usine pendant trois ans. Nous avons des commandes de près de 5 millions de mètres linéaires de tissu à fabriquer. L'entreprise ne dispose pas d'une ligne de crédit pour l'approvisionnement en matières premières et aucune décision gouvernementale n'a été transmise aux banques. On nous a même orientés à la centrale syndicale pour obtenir de lever le blocage bancaire », nous expliquent les syndicalistes. Lors de la réunion de dimanche dernier, intervenue suite à un rassemblement organisé devant la SGP-IM, les responsables de tutelle ont donné leur accord pour financer un approvisionnement « de deux mois de matières premières ». « ça va fonctionner deux mois et on retombera dans les mêmes problèmes, si le coton arrive effectivement. Auparavant, on nous refusait de payer la matière première en raison de l'absence de plan de charge. A présent que nous avons des commandes importantes, on n'obtient toujours pas de financement », nous dit le secrétaire général de la section syndicale. « Ils sont prêts à financer la fermeture des filiales avec des moyens supérieurs à leur relance », ajoute-t-il. Pourtant, l'outil de production est compétitif. Le produit est de qualité et l'entreprise s'est spécialisée dans les tissus lourds, recevant de grandes commandes de la part des différents corps des services de sécurité. L'entreprise est viable et le partenaire social avait donné son accord en juin dernier pour un nouveau plan social prévoyant 200 départs à la retraite, dans des conditions satisfaisantes. « Il devait être mis en œuvre en juillet, mais quatre mois plus tard, les responsables refusent de mettre les moyens requis pour le volet social », dit le SG de la section syndicale.