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Point de vue : Libye : La guerre, ses dividendes et la paix
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Publié dans El Watan le 22 - 06 - 2016

L'entrée à Syrte des forces du nouveau gouvernement El Serraj conforte la stratégie de ce dernier de mettre en avant «la bataille de Syrte» pour sa portée symbolique forte et son potentiel unificateur. Chasser l'EI, stigmate honteux pour la quasi-totalité des Libyens, est une garantie de gain de crédibilité et de ralliements. L'affirmation d'une force, dans le contexte de fragmentation libyen, a, en soi, un effet centralisateur et ouvre la possibilité d'entrée dans un cercle vertueux.
Après l'affirmation graduelle de son autorité sur Tripoli et la prise de contrôle des principaux ministères, cette bataille confirme que ce gouvernement, perçu comme porté à bout de bras par la communauté internationale, ne manque ni de ressources ni d'enracinement. Si l'ONU, avec l'appui de l'Occident, a fortement contribué à son émergence, celle-ci est d'abord redevable à des dynamiques endogènes.
Il y a plus d'un an que les principales forces militaires locales, sous la pression de leurs communautés lassées par la guerre, s'étaient engagées dans des réconciliations à la base, tournant le dos aux deux pouvoirs concurrents de Tripoli et Tobrouk. Les émissaires de l'ONU n'ont fait qu'accompagner ce mouvement en s'appuyant, dans les négociations, sur les acteurs locaux désengagés de la guerre pour contourner les blocages des deux gouvernements rivaux que cette dynamique a même mis en crise.
Mais autant que les impasses de la guerre, les dividendes de celle-ci et leur reconversion entrepreneuriale ont été l'autre ingrédient du processus de stabilisation. Il n'est pas fortuit que ce sont des milices de Misrata qui soient entrées les premières dans Syrte. Hier très déterminées et déterminantes dans la chute d'El Gueddafi, puis contre le Parlement élu en 2014 qu'elles ont contraint à se réfugier à Tobrouk parce qu'elles l'assimilaient au retour des anciennes élites, elles sont au contraire, aujourd'hui, le principal garant militaire du processus de réconciliation.
Elles assument l'essentiel de la sécurisation de Tripoli avec 53 compagnies contrôlant le sud-ouest de la ville, son centre et ses lieux de pouvoir. Mais derrière les milices, ce sont les entrepreneurs qui ont pesé dans le basculement de Misrata vers la réconciliation. Très structurés dans un Conseil des entrepreneurs, ils ont fait gagner aux municipales d'avril 2014 une liste sur un programme de réconciliation. Cette victoire signifiait que la ville, devenue redoutablement guerrière, revenait à son identité première de ville entrepreneuse. Misrata est une ville aux vieilles traditions commerçantes et urbaines avec une population originaire de tout le pourtour méditerranéen.
Ses négociants dont certains ont une origine maltaise, crétoise et souvent turque, sont connectés à des réseaux à l'échelle de toute la Méditerranée. Ils dominent l'activité économique à l'intérieur du pays, y compris à l'est où se trouve le gouvernement rival de Tobrouk. Ayant acquis aujourd'hui, grâce à leurs milices, une position de force sur le terrain politique et militaire qui leur était interdit par El Gueddafi, ils reviennent à la rationalité entrepreneuriale qui a fait leur force et les pousse à la réconciliation.
La force et la viabilité du modèle économique de Misrata sont basées sur un rayonnement sur tout le pays. Au risque de nuire à celui-ci et de s'enclaver, elle se devait de déminer, par la réconciliation, les inimitiés à son égard. C'est aussi le cas d'une partie importante des nouvelles élites surgies de la guerre par la prédation et qui mise sur la stabilité pour pérenniser ses positions acquises.
La trajectoire de Belhadj, ancien djihadiste et premier gouverneur militaire islamiste de Tripoli la symbolise. Homme fort de Tripoli, il ne réussit pourtant pas à s'y faire élire et sera un des meneurs de l'opération militaire «Fajr» qui a chassé le Parlement élu vers Tobrouk. Aujourd'hui, il est l'un des soutiens de la réconciliation et participe à sa sécurisation avec 27 compagnies armées qui contrôlent l'est de Tripoli. C'est qu'entre-temps il a réussi à se convertir dans les affaires avec un empire financier comprenant même une compagnie d'aviation et une chaîne de télévision.
Cette dynamique de prédation et sa conversion entrepreneuriale se lit dans le paysage urbain au travers de micro-chantiers qui, au contraire des grands chantiers de l'avant-révolution arrêtés, foisonnent à Tripoli. Tout comme se lit le poids de la violence qui l'a permise dans les balafres infligées par ces constructions aux paysages inconstructibles : plages, sites archéologiques et espaces forestiers.
Les circuits commerciaux sont autant chamboulés par une nouvelle élite de miliciens argentés qui se connectent directement aux réseaux extérieurs, se dispensent de payer les impôts, bloquent les importations de leurs concurrents. Ces reclassements, favorisés par la violence, ne sont pas à la portée de tous. Les miliciens affairistes font partie de ceux qui étaient bloqués au seuil de l'élite et frappaient à sa porte. Aujourd'hui qu'ils sont dans la demeure, ils veulent la paix pour fructifier leur «accumulation primitive» en la recyclant.
Derrière le blocage que rencontre le gouvernement d'El Serraj pour son adoubement par le Parlement de Tobrouk, il y a aussi une question de dividendes de guerre. Un noyau dur d'une vingtaine de députés «fédéralistes», appuyés sur des milices tribales et alliés au général Haftar, y joue un rôle disproportionné et le tiennent en otage malgré une majorité de députés prête à soutenir le gouvernement El Serraj. Ils instrumentalisent le sentiment de frustration de la région est, marginalisée par El Gueddafi.
Mais derrière, il y a le ressentiment et le désir de revanche contre les élites économiques de Misrata qui dominent toute l'activité économique de la région est dont le développement, favorisé par la proximité des gisements pétroliers, a mieux profité à ces dernières qu'aux élites locales marquées par la tradition pastorale. La montée en puissance des élites de Misrata peut rajouter aux crispations des élites de l'est. La récupération d'une partie de celles-ci par une franche ouverture, y compris par le recyclage des seigneurs de la guerre comme à l'ouest, conditionne le devenir du gouvernement El Serraj qui dispose d'une rare fenêtre d'opportunité pour asseoir et légitimer une autorité centrale.


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