Dans une longue et exclusive interview accordée à la chaîne d'information France24 samedi dernier, le président turc Recep Tayyip Erdogan est revenu avec force détails sur le coup d'Etat manqué qui l'a visé. M. Erdogan a accusé l'imam Fethullah Gülen d'être le véritable instigateur du putsch militaire raté. «Il y a eu cette tentative de coup d'Etat et on sait qui se cache derrière, a déclaré le président turc, le visage visiblement fatigué après cette épreuve. Ils seront jugés et les tribunaux permettront d'établir que Fethullah Gülen est la tête de l'organisation.» Le président turc a ajouté : «Ils (les putschistes, ndlr) ont déjà commencé à avouer et ils avouent d'où leur sont venues les instructions, de Gûlen.» Enchaînant pour mieux étayer ses accusations que «le ravisseur qui avait retenu en otage le chef de l'état-major turc a proposé à ce dernier de parler directement au téléphone avec Fethullah Gülen». Par ailleurs, le président turc a critiqué en filigrane la position américaine qui ne semble pas très disposée à extrader Fethullah Gülen. «On nous demande des documents et des preuves, mais la Turquie a toujours répondu positivement aux demandes américaines d'extradition et sans qu'on nous fournisse un seul document», ajoutant que son «pays va constituer dans une dizaine de jours un dossier solide avec toutes les preuves afin de convaincre Washington d'extrader Gûlen vers la Turquie pour être jugé». Concernant les arrestations en cours, M. Erdogan a annoncé que la purge va continuer «jusqu'à l'éradication du virus et du cancer Gülen qui s'est métastasé dans quasiment tous les ministères, dans les forces armées et dans les institutions de l'Etat». Rejetant d'un revers de la main les accusations de l'Union européenne qui lui reproche de profiter du coup d'Etat pour se débarrasser de ses adversaires et de museler les libertés, M. Erdogan a déclaré : «Les critiques occidentales ne m'intéressent pas. Je ne les écoute pas. Aucun de ces pays n'a vécu ce que nous avons vécu, ils n'ont pas été confrontés à une tentative de putsch visant à détruire l'Etat.» Et de poursuivre : «Je pose la question aux responsables européens, soutenez-vous la démocratie ou le coup d'Etat ? Quand on se livre à des critiques, il faut d'abord faire une bonne évaluation. Quelles sont leurs sources, sur quelles informations se basent-ils pour lancer des critiques erronées ? A moins qu'ils n'aient des préjugés contre la Turquie.» S'agissant de la peine de mort que le président turc veut voir rétablie et les critiques que ce projet suscite également en Europe, M. Erdogan a fait savoir que si les députés, élus par le peuple, le décidaient, eh bien la peine de mort sera rétablie en Turquie, indiquant au passage que de nombreux pays appliquent déjà la peine de mort comme la Chine, les Etats-Unis, l'Iran… Le président turc a promis de continuer la purge jusqu'à ce que tous ceux qui ont eu un lien direct ou indirect avec le coup d'Etat raté soient débusqués et jugés.