Les trois responsables européens sortants, qui doivent tous affronter des élections dans quelques mois, ne peuvent engager leurs pays respectifs dans des décisions concrètes. Et même sans Londres, le rêve d'une «défense commune» reste une chimère. D'ailleurs, si l'Allemagne ne compte pas renoncer à son rôle de «contrôleur» des paramètres de Maastricht, les Italiens n'hésitent pas, eux, à monnayer la carte du dossier des réfugiés pour amadouer Berlin sur la situation économique de leur pays. Une croissance très faible (moins de 1%), un endettement public très important, et un taux de chômage oscillant n'invitent guère à l'optimisme. Mais Angela Merkel ne veut pas fâcher son hôte précieux dans la gestion du problème de la pression migratoire. La chancelière allemande, même si elle explique clairement qu'il n'est pas question d'assouplir les conditions du pacte de stabilité, ne rechigne pas à complimenter Matteo Renzi sur son plan de réforme du travail en cours d'application. «L'Europe est la solution et non pas le problème, et le Brexit (sortie de la G-B de l'UE) n'est pas la fin», renchérit le président du Conseil italien. Ce dernier a d'ailleurs tenu à organiser ces retrouvailles avec les deux autres leaders européens sur la petite île de Ventotene, lieu symbolique de la fondation de l'Europe pour les Italiens, car c'est dans cette prison à ciel ouvert — où le régime fasciste confinait les intellectuels qui s'opposaient à sa propagande — qu'Altiero Spinelli, ancien homme politique et écrivain, avait écrit son manifeste pour «une Europe unie et libre». Les chefs d'Etat français et de gouvernement, allemand et italien, ont déposé à l'occasion une gerbe de fleurs sur la tombe de celui qu'on considère comme l'un des pères fondateurs de l'Union européenne. Rome revendique souvent son rôle de pionnier de l'esprit européen, surtout que l'année prochaine on fêtera les 60 ans du Traité de Rome. La conférence de presse programmée sur le porte-avions Garibaldi, navire fleuron de la Marine italienne et engagé dans l'opération européenne «Sophia» de lutte contre le trafic de migrants, a permis à Matteo Renzi de plaider pour une plus ample coopération européenne pour contrôler les frontières et garantir la sécurité interne et externe des pays membres. Pour sa part, François Hollande a insisté sur la nécessité de «trouver des mécanismes de financement» en Afrique pour limiter le phénomène de l'immigration vers l'Europe.