Le conseil local de l'Ordre des architectes de la wilaya de Tamanrasset (CLOA) vient de jeter un pavé dans la mare en faisant de graves révélations sur la commission d'évaluation des concours d'architecture et ses membres soupçonnés de «pratiques douteuses». Dans une lettre de doléances adressé au chef de l'exécutif, et dont nous détenons une copie, le CLOA a dénoncé les «dépassements» de la commission mise en cause et fait état de plusieurs recours adressés vainement à qui de droit. A commencer par la composante de la commission constituée de membres, des directeurs de l'exécutif pour la majorité, de plus en plus contestés par les professionnels du fait de leur incompétence dans l'évaluation des projets complexes notamment ceux classés en catégories C et D. A cela s'ajoute la désignation d'autres membres, dont des architectes libéraux, pour une période de plus de 4 ans. Ce qui se répercute négativement sur la gestion de la commission qui, de surcroît, ne dispose pas d'un règlement intérieur encore moins d'un barème de notation des projets. La correspondance, également envoyée au président du Conseil national de l'Ordre des architectes, au président de l'APW de Tamanrasset et à la direction locale de l'urbanisme, de construction et de l'habitat (DUCH), a décrié aussi la méthode d'évaluation des projets présentés parfois par des personnes étrangères à la commission et pis encore sans avoir à étudier profondément les dossiers des candidats. «Les problèmes entre les bureaux d'études et la commission d'évaluation des concours d'architecture ne datent pas d'aujourd'hui, car elle a toujours été soupçonnée de pratiques pas très catholiques dans l'attribution de certaines études d'architecture, lesquelles sont étrangement octroyées à un seul bureau à chaque fois», regrette un représentant du CLOA. Parlant sous le couvert de l'anonymat, notre interlocuteur nous apprend, qu'à la suite des deux derniers concours lancés pour l'étude de la réalisation des nouvelles circonscriptions administratives, In Salah et In Guezzam, qu'ils ont «reçu des recours de plusieurs bureaux d'études. Nous avons donc mené une petite enquête qui a révélé que des pots-de-vin ont été versés par le bureau lauréat des deux projets à certains membres de la commission qui lui ont attribué des notes bien grasses. Suite à quoi, nous avons saisi le secrétaire général de la wilaya qui n'a jamais donné suite à nos courriers». Conformément à la réglementation en vigueur, certains bureaux, précise notre source, ont déposé des recours auprès du secrétaire général de la wilaya, cependant leurs recours ont été jugés non fondés. «Manipulé par le président de la commission, le secrétaire général a réagi en procédant à la constitution d'une nouvelle commission dans laquelle il a réintégré les membres les plus suspects, comme pour narguer les CLOA des wilayas de Tamanrasset et d'Adrar qui ont osé contester», explique notre interlocuteur en exigeant l'ouverture d'une enquête sur les procédures de sélection des projets, la concertation avec le conseil pour le choix des membres de la commission et la constitution d'une commission sectorielle à l'instar des autres wilayas. Notons que ces irrégularités, qui s'apparentent à un véritable scandale, ont déjà été signalées, en avril dernier, par le CLOA d'Adrar qui avait saisi le ministre de l'Habitat, de l'Urbanisme et de la Ville, Abdelmadjid Tebboune. Cependant, sa doléance est restée lettre morte, regrette notre vis-à-vis en précisant que le conseil d'Adrar a été impliqué, car un bureau relevant de cette wilaya du Grand Sud avait participé aux deux concours controversés. «Etant dans une politique de récession économique, les projets auraient pu être confiés à des groupements de bureaux afin de permettre à tout le monde de travailler. Il en aura pour environ 60 millions de dinars pour un travail de quatre mois au maximum. Alors que cela aurait pu être reparti en lots confiés à plusieurs bureaux, où on aura une diversité architecturale et une véritable concurrence intellectuelle», a-t-il conclu. La direction de l'urbanisme, de la construction et de l'habitat (DUCH) de la wilaya de Tamanrasset a, en rejetant en bloc les accusations proférées par le CLOA, expliqué que les procédures relatives à l'octroi des études d'architecture ont été effectuées conformément au décret présidentiel 15/247 du 16 septembre 2015 portant code des marchés. Dans sa réponse, adressée entre autres au CLOA d'Adrar, la DUCH a tenu à préciser que l'évaluation des concours s'est déroulée dans la transparence et en concertation avec l'ensemble des membres de la commission qui, a-t-on rappelé, a géré, sans problème, 11 concours d'architecture de la période s'étalant entre janvier 2015 et la fin du premier trimestre 2016.