Les marches d'aujourd'hui sont un moyen de «jauger» le degré de popularité du MAK et sont déterminantes pour son avenir politique. Le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) compte marquer le Nouvel An berbère, Yennayer 2967, en invitant à des marches pacifiques à Béjaïa, Tizi Ouzou et Bouira, à travers un appel qui circule depuis quelques jours sur les réseaux sociaux. Cette année, contrairement aux précédentes, les actions de rue du MAK vont se dérouler dans un contexte particulier. Beaucoup de choses ont changé depuis les marches du 20 avril 2016 dans les principales villes de Kabylie, actions «historiques» aux yeux de nombreux militants du Mouvement de par leur degré de mobilisation. Il y a d'abord les divergences internes qui sont apparues au grand jour en 2016 entre, d'un côté, le mouvement à l'intérieur, le MAK et, de l'autre, sa direction, l'Anavad, le «gouvernement provisoire kabyle (GPK)», exilé en France. Partisan de la ligne de l'autodétermination, Bouaziz Aït Chebib, le président du MAK, et tout son exécutif ont démissionné en novembre dernier. Selon des indiscrétions recueillies auprès d'un cadre du Mak, Aït Chebib serait opposé à la ligne «indépendantiste» incarnée par le président du GPK, Ferhat Mehenni. Les marches d'aujourd'hui constituent, de fait, un moyen pour «jauger» le degré de popularité du Mouvement et vont être déterminantes pour son avenir politique. Or, des observateurs au sein même de ce mouvement estiment que celui-ci n'est pas sorti indemne de cette division des rangs. Pronostiquant sur l'étendue et l'ampleur des actions prévues pour d'aujourd'hui, un ancien cadre du mouvement interrogé a indiqué : «Les prévisions sont très difficiles, car il y a un mécontentement total par rapport à la conduite despotique de Ferhat Mehenni.» «Dans le MAK, il y a trois catégories de militants : a) les vassaux de Ferhat qui le suivront même s'il dit un jour que la Kabylie sera un émirat arabe islamiste ; b) ceux qui sont, comme moi, dans la légitimité, c'est-à-dire la ligne de l'autodétermination décidée lors du dernier congrès à Aït Zellal, qui laisse le choix au peuple kabyle de décider lui-même de son sort ; c) ceux qui sont juste pour une cause kabyle et attirés par le langage rassembleur de Aït Chebib. Je pense que seule la première catégorie marchera demain (aujourd'hui, ndlr).» L'autre donnée à ne pas perdre de vue est la répression, dont font l'objet aussi bien les dirigeants que les militants de la base du mouvement, qui a eu raison de la détermination de beaucoup d'entre eux. Toléré du temps de l'embellie financière, le MAK est la préoccupation première des services de sécurité en Kabylie, depuis que la crise financière s'est installée, augmentant les risques de sédition. Des militants, pourtant activant dans un cadre pacifique, sont systématiquement arrêtés et conduits au commissariat. Cet acharnement, outre le fait de démoraliser les militants en instaurant un climat de peur de tout activisme, empêche le mouvement de se structurer, donc de se rapprocher des citoyens pour diffuser ses idées. A cela s'ajoute le climat politique et social d'une région qui vient de sortir d'un épisode d'émeutes avec leur lot de violences. Toute la question est donc de savoir non seulement si la mobilisation au sein du Mak sera au rendez-vous, mais aussi de connaître quelle attitude adopteront les services de sécurité à l'égard de ces actions de rue pacifiques.