L'alerte a été donnée, hier, par la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), soutenue par un réseau d'associations de lutte contre le sida, elles aussi bénéficiaires de ce financement. Elles sont en tout cinq associations à relever les lacunes quant au fonctionnement du Comité de coordination médicale (CCM) présidé par la secrétaire générale du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière dont l'activité est gelée depuis le mois de juin dernier. Un comité ad hoc a été alors créé, entre autres, par les auteurs des malversations. La Forem a également soulevé la question du limogeage injustifié de la coordinatrice du projet, Mme Dekkar, qui a présidé l'unité de gestion chargée de l'exécution de ce projet depuis plus d'une année. La Forem lance ainsi un appel aux autorités concernées afin de mettre un terme à cette situation confuse. Le directeur exécutif de la Forem, M. Makki, est formel. Il n'est pas question de taire de telles maladresses et dysfonctionnements. Il a fait savoir que son association ainsi que d'autres collectifs font l'objet de « représailles » pour avoir demandé une gestion transparente et démocratique de ce programme. Il proteste contre le fait que son association n'a pas été invitée, tout récemment, à prendre part à la consultation nationale en vue d'une refonte du programme et de la stratégie de lutte contre le VIH sida. « Notre association fait les frais de ressentiments émanant de prétendus scientifiques dont ils n'ont même pas l'habit. Elle est privée d'une source de financement en ne lui accordant qu'un budget de 22 500 dollars, ce qui ne représente que 3,7% du total des sous-bénéficiaires », a déclaré M. Makki lors d'une conférence de presse animée au siège de la Forem à Alger, en présence des membres de l'association et de Mme Dekkar. Revenant sur les dysfonctionnements constatés au sein du CCM et mentionnés dans une déclaration commune paraphée par les cinq associations, remise au CCM et au ministre de la Santé, M. Makki a estimé qu'il n'est pas question de fermer les yeux sur cette malversation pour l'achat d'un appartement non budgété dans le programme financier de Global Fund par l'association Aids- Algérie. « L'accusation a été portée lors de la réunion du CCM, le 27 mars dernier, par la représentante de Global Fund contre Aids. Cette acquisition est d'une grande gravité qui aurait due être suivie d'une réaction de salut public. Or, chose troublante et moralement inacceptable, nous avons entendu sans réagir. Même la présidente du comité, actuelle secrétaire générale du ministère de la Santé (ndlr), a repoussé d'un revers de la main, sans appeler au vote du CCM sur la proposition de notre collègue de la Forem de constituer une commission d'enquête. Elle ira jusqu'à déclarer, par pudeur, que nous ne sommes pas là pour nous accuser les uns les autres », a déclaré M. Makki, en signalant que le comité a voulu étouffer l'affaire. L'affaire en question, a signalé M. Makki, a été confirmée par un audit qui a constaté un trou de 8 millions de dinars. UNE ENVELOPPE DE 6,5 MILLIONS DE DOLLARS SUR DEUX ANS Pis, ajoute le conférencier, le bilan de cette association (Aids Algérie) pour l'année 2005 a été jugé négatif mais cela n'empêchera pas la présidente du CCM de désigner son président membre du comité ad hoc qui lui attribuera un nouveau financement aussi important que le premier, qui était de 310 000 dollars. Et c'est ce même comité qui décide des montants de financement des activités des autres associations. Pour M. Makki, laisser aller le fonctionnement du CCM au détriment des règles de droit et de l'éthique est une gageure pour des personnalités aussi dignes que respectables que sont les membres de ce comité. Le collectif des associations regrette qu'un mauvais esprit règne au sein du CCM, il régnera et empestera la vie du CCM tant que celui-ci n'a pas défini des critères justes et efficients de fonctionnement. Par ailleurs, le conférencier a souligné que le principal bénéficiaire de ce programme, qui est le ministère de la Santé, a bénéficié d'une enveloppe de 550 000 dollars pour l'année 2005, dont une grande partie est réservée à l'achat de 10 millions de préservatifs et 337 000 dollars pour l'achat des médicaments (trithérapie). Ce même principal bénéficiaire s'est vu attribuer les deux tiers du montant consacré par Global Fund pour l'année 2006. L'ex-coordinatrice de l'unité de gestion, Mme Dekkar a, quant à elle, tenu à préciser que son limogeage en juillet dernier n'est pas encore suivi d'une décision de fin de mission. « Je n'ai même pas été entendue par les responsables, le ministre de la Santé notamment. C'est moi qui ai demandé une audience à laquelle je n'ai pas encore eu de réponse », a-t-elle signalé en précisant : « Je suis persuadée que le ministre de la Santé n'est pas bien informé au sujet de ce dossier. D'où cette conférence de presse. » Pour rappel, la subvention signée entre le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière et le Global Fund pour la lutte contre le VIH/sida porte sur une enveloppe de 6,5 millions de dollars. Ce programme de deux années a fait l'objet d'une convention signée, en 2004, entre les deux parties et une budgétisation qui est attribuée aux ONG. En attendant de mettre l'affaire au clair, le Maroc, pays bénéficiaire également du même programme, est à sa deuxième phase de finalisation. Il a déjà assuré le financement de la lutte contre le VIH/sida pour les prochaines années.