La ville de Tébessa est en ébullition depuis que le ministère de l'Intérieur a rendu publics les détails des résultats des législatives du 4 mai. A l'origine, «une manipulation» des voix au niveau de la wilaya qui a fait perdre au RND (Rassemblement national démocratique) un siège, affecté au FLN (Front de libération nationale). En effet, selon le procès-verbal de la commission électorale de la circonscription de Tébessa, ayant son siège à la cour de la même wilaya (voir fax similé), le RND vient en première position avec 41 991 voix, sur les 157 674 voix exprimées (sur les 448 616 inscrits), ce qui lui a permis d'obtenir 3 sièges. Il est suivi du FLN avec 27 848 voix et l'obtention de 2 sièges, alors que le PNSD (Parti national social et démocratique), le MSP (Mouvement pour la société et la paix) et Al Houriya Wal Adala ont obtenu chacun un siège, des 8 à pourvoir. Signé par des magistrats, ce procès-verbal a été envoyé au greffe du Conseil constitutionnel, aux représentants des candidats et à la Haute instance indépendante de surveillance des élections (HIISE), ainsi qu'aux ministères de la Justice et de l'Intérieur, tel qu'il est précisé dans le document. Mais hier, lorsque le ministère de l'Intérieur a rendu publics les résultats par circonscription, la surprise a été totale. Les chiffres concernant la wilaya de Tébessa diffèrent de ceux portés sur le PV de la commission électorale, présidée par des juges. Jugeons-en. Le nombre de bulletins annulés recensés par la commission a été arrêté à 26 322, alors que sur le tableau récapitulatif du ministère de l'Intérieur, il est de 13 896. Le nombre de voix exprimées est de 157 474 sur le procès-verbal de la commission, alors que pour le ministère de l'Intérieur, il est de 166 299 voix. Mieux encore. Le nombre de votants est passé de 183 796, sur les 448 616 inscrits, enregistrés par la commission électorale, à 180 195 selon le ministère de l'Intérieur. Visiblement, les chiffres ont été manipulés après leur validation officielle par la commission électorale. Ce qui constitue une fraude avérée, condamnée par la loi. Hier, les représentants du RND ont utilisé la radio locale pour apporter des précisions, en attendant le recours devant le Conseil constitutionnel. En tout état de cause, cette manipulation des chiffres n'a pu avoir lieu qu'au niveau de la wilaya, d'où les résultats du scrutin sont transmis au ministère de l'Intérieur. Hier, la ville de Tébessa était en ébullition. La crainte de dérapages pesait lourdement et le climat n'était pas aussi serein. Qui a intérêt que pour un siège, la ville bascule ? On n'en sait rien. Ce qui est certain, c'est que malgré les garanties de la loi, les mises en garde du ministre de l'Intérieur et de la HIISE, qui veillent, théoriquement, à la transparence du scrutin, il y a encore des responsables de l'administration qui n'arrivent pas à se défaire du recours à la fraude pour améliorer le score de certains candidats et partis politiques au pouvoir. Le cas flagrant de Tébessa n'est pas isolé. Dans de nombreuses autres circonscriptions électorales, les candidats ont dénoncé le recours à ces pratiques scandaleuses et les saisines commencent à tomber au niveau du Conseil constitutionnel, institution chargée de trancher les recours déposés par les contestataires.