La fin des guerres en Irak passerait-elle par une réconciliation entre ces fameux frères ennemis, c'est-à-dire la Syrie et l'Irak pendant longtemps dirigés par deux branches du parti Baâth, bien que cela soit toujours le cas chez le premier ? A vrai dire aussi bien la Syrie qui avait participé en 1990 à la première guerre du Golfe contre le régime de Saddam Hussein que l'Iran sont sollicités, ou encore puisque Washington hésite à se déterminer, il est souhaité que ces deux pays exercent leur influence. Dans un cas, c'est fait, et de manière spectaculaire, puisque l'Irak et la Syrie ont renoué leurs relations diplomatiques rompues il y a plus de 25 ans, ont annoncé, hier, les chefs de diplomatie des deux pays lors d'une conférence de presse à Baghdad. « Nous venons de conclure un accord en vertu duquel les relations diplomatiques rompues depuis un quart de siècle ont été complètement rétablies », a dit le ministre irakien des Affaires étrangères, Hoshyar Zebari. « Le drapeau irakien flottera ainsi en Syrie et la drapeau syrien sera hissé en Irak », a dit M. Zebari. Il a annoncé que les deux pays allaient « coopérer en matière de sécurité » et que des experts des deux pays allaient se rencontrer pour discuter de ces questions. Le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, achevait, hier, sa première visite à Baghdad depuis la chute de Saddam Hussein. Pour l'histoire, c'est en 1980, au début de la guerre de huit ans qui l'avait opposé à l'Iran, que l'Irak de Saddam Hussein avait rompu ses relations diplomatiques avec la Syrie pour protester contre le soutien apporté par Damas à Téhéran. Mais on ne sait s'il faut inscrire cette reprise sur la volonté des deux pays uniquement, ou encore dans un vaste plus global, comme le laissent suggérer les récentes révélations de la presse américaine sur des rencontres entre Syriens et Américains. La visite du chef de la diplomatie syrienne s'est déroulée à un moment où, effectivement, se multiplient les appels à des discussions directes entre Washington et Damas, ainsi qu'avec Téhéran. Ce souhait, en faveur d'un nouveau positionnement vis-à-vis de la Syrie, a encore été renforcé depuis les élections parlementaires américaines et la victoire des démocrates, plus enclins à renouer des liens avec Damas. Le sénateur Joseph Biden, qui présidera à partir de janvier la puissante commission du Sénat pour les Affaires étrangères, a appelé lundi à des discussions pour conduire la Syrie et l'Iran vers un « accord de non-agression » avec le régime irakien. Une idée également développée ces derniers jours par l'ancien secrétaire d'Etat Henry Kissinger, qui est encore un conseiller influent auprès George W. Bush. Des discussions directes avec la Syrie et l'Iran font en outre partie des recommandations attendues de la part du Groupe d'études sur l'Irak, co-présidé par l'ancien secrétaire d'Etat James Baker et qui doit rendre ses conclusions en décembre. Scott Lasensky, du centre de recherche Institute for Peace, estime que la visite de Mouallem représente « un vote de confiance » à l'égard du gouvernement de Nouri al Maliki. « Il y a des aspects de la visite qui vont à la fois stimuler et donner plus de poids à un réexamen de la politique ici et à l'argument en faveur de contacts avec les Syriens », ajoute-t-il. Jusqu'ici l'administration Bush, qui a rappelé son ambassadeur en Syrie l'an dernier en raison des soupçons de l'implication de Damas dans l'assassinat du Premier ministre libanais Rafic Hariri, a refusé cette option. « Il n'y a pas de signe que la Syrie soit une force de stabilisation », a déclaré la secrétaire d'Etat Condoleezza Rice la semaine dernière. Mais face à la détérioration de la situation en Irak, les difficultés du gouvernement libanais et l'impasse du processus de paix israélo-palestinien, Bush pourrait avoir du mal à maintenir sa position envers la Syrie. Mme Rice n'a d'ailleurs pas complètement fermé la porte à un changement en déclarant : « Je suis prête à parler à tout le monde, à tout moment (...) si je pense que nous pouvons faire des progrès. » D'une manière générale, il es attendu de la Syrie qu'elle aide à l'apaisement de la tension actuelle entre sunnites et chiites irakiens qui s'entretuent. Mais si l'option politique semble pour une fois privilégiée, le militaire pourrait quant à lui connaître une nette relance. L'armée américaine étudie trois options pour améliorer la situation en Irak : accroître le nombre de soldats, alléger la force mais rester plus longtemps, ou se retirer du pays complètement, rapporte le Washinton Post. Ces trois options, connues au Pentagone sous les noms de « Go Big », « Go Long » et « Go Home », selon de hauts responsables du ministère de la Défense sous couvert d'anonymat, ont été étudiées par un groupe d'experts travaillant pour l'état-major. Selon ces sources, les experts vont probablement recommander, dans un premier temps et à court terme, une légère augmentation des troupes — de 20 000 à 30 000 hommes supplémentaires — , et, sur le long terme, un engagement en matière d'entraînement et de conseil aux forces irakiennes. L'option « Go Big » nécessiterait plusieurs centaines de milliers de troupes supplémentaires tant américaines qu'irakiennes, ainsi qu'une police irakienne lourdement armée, selon le quotidien. Elle a été écartée par les experts, considérant que les effectifs de l'armée américaine sont insuffisants pour y faire face et que les forces irakiennes ne sont pas assez performantes. L'option « Go Home » a été également rejetée car elle plongerait l'Irak dans une guerre civile sanglante, selon le journal. De toutes les manières, il est question de désengagement, et de préférence avant l'élection présidentielle US de novembre 2008. Est-ce possible ?