Alors que la guerre “éclair” fait encore rage à Bagdad, voilà que des bruits de bottes se font déjà entendre du côté de la Syrie et de l'Iran. Eclairage. La rumeur, même démentie, est très persistante. Damas et Téhéran seraient les prochaines cibles de George Bush, qui semble prendre goût à la guerre, fût-elle meurtrière pour les populations civiles, entend-on par-ci par-là. Hier, deux généraux américains ont “conseillé” à David Rumsfeld, le secrétaire d'Etat à la Défense, d'attaquer la Syrie et l'Iran, tout de suite après avoir soldé ses comptes à Saddam Hussein. Cette affaire commence à être prise au sérieux sur la scène diplomatique mais aussi au sein de la rue arabe, où le sentiment de persécution s'accroît de jour en jour. En témoignent les cortèges des “combattants de la paix” qui prennent la route de Bagdad pour mourir pour la “Oumma”. Et pour cause, les déclarations de ces deux officiers supérieurs des marines, reprises par le correspondant du quotidien arabe Al Hayat basé à Londres, interviennent quelques jours seulement après le fameux démenti de Colin Powell quant à l'intention prêtée à Washington de diriger ses B52 vers Damas et Téhéran juste aussitôt le “bûcher” de Bagdad éteint. Et les médias internationaux n'ont pas manqué d'explorer cette piste qui semble, au fil des jours, vraisemblable, même si les américains ne veulent pas abattre leur carte, pour des raisons évidentes de stratégie. C'est que l'Administration américaine ne souhaite pas s'aliéner les autres pays arabes déjà fortement ébranlés par les frappes qui ciblent la population irakienne. La sentence, quant à elle, est apparemment tombée : les USA auraient étendu leur “axe du mal” à la Syrie, en compagnie de l'Iran, qui lui, est un pays traditionnellement anti-américain. Et les clins d'oeil qui créditent une telle perspective sont nombreux. A commencer par la déclaration de Powell le 12 mars dernier devant la Chambre des représentants de son pays, lorsqu'il a soupçonné la Syrie de développer des armes de destruction massive. Ce fut là le premier signe d'irritation de Washington par rapport à la position de Damas sur la crise irakienne. Le même Powell revient, quelques jours plus tard, à la charge pour qualifier la présence des soldats syriens au Liban “d'occupation”. Côté syrien, on répond aussi du tac au tac. Le mufti sunnite avait appelé aux attaques suicide contre les soldats américains. Son président Bachar El-Assad, lui, a souhaité ouvertement l'échec des Américains en Irak dans une interview à un journal libanais. La guerre froide a donc commencé et l'inimitié entre les deux pays va crescendo. Les Américains qui comptent remodeler, à leur convenance, le Moyen-Orient, souhaitent se débarrasser de la Syrie qui n'est pas en odeur de sainteté avec les dirigeants de l'Etat hébreu. Et dans le cadre de cette recomposition géopolitique dont les juifs auraient la part belle, le régime de Damas, si proche de celui de Bagdad, serait forcément indésirable. En effet, une fois l'Irak, “normalisé”, “américanisé”, la Syrie apparaîtrait comme un cheveu dans la soupe israélo-américaine, dont il faudrait s'en débarrasser pour couronner Sharon “roi” du Moyen et Proche-Orient. Mais au-delà, il y a aussi le vieux contentieux du Golan, occupé depuis 1967 par Israël et que la Syrie revendique toujours. De fait, Damas reste, aux yeux des juifs, une menace sérieuse pour sa stabilité, juste après l'Irak. C'est pour quoi l'administration du criminel Ariel Sharon n'a pas raté l'occasion pour apporter l'eau au moulin des Américains. Le chef du département du renseignement militaire israélien a, en effet, déclaré devant la commission des Affaires étrangères et de Défense de la Knesset : “L'Irak peut avoir transféré en Syrie des missiles et des armes de destruction massive.” Son argument ? Les chefs des inspections de l'ONU n‘ont rien trouvé dans les sites suspects de l'ouest de l'Irak… Ce responsable, en réalité, ne fait que désigner une cible aux GI's américains en application d'un plan stratégique concocté par l'un des proches collaborateurs de George Bush d'origine israélienne Wolwofitz en l'occurrence. C'est dire qu'aussi improbable qu'elle puisse paraître, une l'attaque américaine contre la Syrie reste tout de même dans le domaine du possible. Quant à l'Iran, la sentence des USA était déjà tombée depuis bien longtemps. Le désordre mondial vient de commencer. H. M.