Les circonstances dans lesquelles Karoui Bachir Serhan, enseignant à l'université de Khemis Miliana, wilaya de Aïn Defla, a été assassiné dans la nuit du dimanche 18 au lundi 19 juin, sont aussi choquantes que troublantes. Son corps a été retrouvé gisant dans une mare de sang dans la cage d'escalier de l'immeuble à Tipasa, où résident deux étudiants, des frères jumeaux, arrêtés quelques heures après le crime. Sous le choc, la communauté universitaire interpelle le Premier ministre… L'assassinat à coups de marteau et de couteau de l'enseignant Karoui Bachir Serhane, âgé de 44 ans, dans la nuit du dimanche 18 au lundi 19 juin, a enflammé les réseaux sociaux et la communauté universitaire est en état de choc. Les circonstances dans lesquelles ce crime odieux a été commis laissent perplexe. La victime, qui habite Alger, a été retrouvée morte, vidée de son sang, dans une cage d'escalier d'un des immeubles de la cité des 122 Logements à… Tipasa. Il était environ 1h. Quelques heures seulement ont suffi aux services de sécurité pour arrêter les premiers suspects. Deux frères, des jumeaux de 23 ans, l'un étudiant au centre universitaire de Tipasa et l'autre à celui d'El Affroun, à Blida, et qui habitent l'immeuble où le corps de la victime a été retrouvé. Que s'est-il passé au juste ? A ce stade de l'enquête, les éléments d'information n'expliquent pas tout. Si les présumés auteurs avouent avoir tué l'enseignant, ils ne lèvent cependant pas le voile sur les raisons de la présence du défunt à Tipasa à une heure aussi tardive, alors qu'il habite Alger, plus précisément à Gué de Constantine. Des sources bien informées affirment que «les deux étudiants ont avoué le crime après avoir été confondus par des indices de preuve collectés par les services de police sur place». Mais que s'est-il passé entre la victime et les deux étudiants pour que ces derniers s'acharnent sur son corps avec autant de violence ? Ce qui est certain, c'est que les présumés auteurs de cet assassinat n'ont laissé aucune chance de survie à l'enseignant. Ils lui ont asséné plusieurs coups de couteau, après l'avoir assommé d'un coup de marteau à la tête, provoquant la mort sur le coup. Lui ont-ils tendu un guet-apens ? S'est-il déplacé jusqu'à Tipasa de son plein gré ? Autant de questions qui restent pour l'instant sans réponse. Hier, dans une déclaration au journal online Ennahar, le père de la victime a affirmé que l'enseignant avait reçu un coup de téléphone juste après la rupture du jeûne. Tout de suite après, il a pris sa voiture en direction de Tipasa. «Il ne se serait jamais déplacé jusqu'à cette cité à Tipasa si celui qui l'avait appelé ne faisait pas partie de ses connaissances», dit-il aux journalistes. Il écarte la thèse selon laquelle le mobile du crime serait lié aux notes, en disant : «Comment peut-il aller négocier des notes avec des étudiants qu'il ne connaissait pas ? Ils ne font pas partie de ses élèves.» En tout état de cause, les deux auteurs présumés devraient être présentés aujourd'hui au tribunal de Tipasa, et en attendant les résultats de l'enquête judiciaire, il faut signaler que ce crime crapuleux a suscité l'inquiétude de la communauté universitaire et des internautes. Ils étaient très nombreux à l'avoir dénoncé en exhortant les autorités à prendre les mesures nécessaires pour protéger la sacralité des lieux du savoir. En effet, le défunt Karoui n'est pas la première victime de violence. Ils sont de plus en plus nombreux les enseignants qui font l'objet d'agression de la part de leurs étudiants non seulement dans la rue, mais aussi à l'intérieur des espaces universitaires où ils sont censés être le plus protégés. Dans une déclaration reprise par l'APS, les syndicalistes de l'enseignement supérieur ont dénoncé l'assassinat de l'enseignant, en le qualifiant d'acte «abominable» et de «lâche». «C'est malheureux où nous en sommes arrivés pour notre université. Ce crime est un acte très grave et lâche. C'est vraiment abominable», a noté Abdelhafid Mellat, du syndicat des enseignants de l'enseignement supérieur (CNES). Il a soutenu qu'«à plusieurs reprises, la tutelle avait été alertée et mise en garde sur la violence au sein des universités et appelée à intervenir en urgence pour mettre fin à ce danger qui devient permanent. Nous allons, à présent, saisir directement le Premier ministre pour qu'il remédie à cette situation grave». M. Mellat a annoncé par ailleurs que la famille universitaire observera aujourd'hui «un jour de deuil national et des sit-in de protestation». Abdelmalek Azzi, également syndicaliste de l'enseignement supérieur, s'est indigné en rappelant les nombreuses interpellations de la tutelle sur «la dégradation constante de la sécurité au sein de nos universités (…). Nous avons dénoncé à maintes reprises la violence et les différents maux qui secouent l'université, sans que nous puissions trouver une oreille attentive de la tutelle. Nous allons nous mobiliser pour que ce crime ne reste pas impuni et saisir le Premier ministre pour mettre fin à cette situation».