Comme beaucoup de villages kabyles, Ath Ouavane, qui possède une association sportive et une autre culturelle dénommée Thimuzgha, est géré par son comité de village. Le village s'autogère merveilleusement bien. Les cotisations des habitants vont à une caisse commune gérée par le comité de village. L'argent sert à tous les projets d'intérêt commun. Au dernier recensement effectué à l'occasion de la dernière fête agricole, Ath Ouavane comptait 4000 âmes dont 2700 vivant sur place, le reste étant des expatriés et des émigrés qui n'ont jamais rompu le lien ombilical qui les relie à leur communauté. «Le village es bien organisé et cela date d'avant l'indépendance», dit Bessadi Hakim, le maire de la commune. «Pendant la guerre, Ath Ouavane a été complètement rasé par l'armée française afin de le punir pour sa participation massive et active à la Révolution. L'indépendance venue, les habitants se sont serrés les coudes et retroussé les manches pour reconstruire entièrement leur village», explique M. Bessadi. Encore vivaces, les traditions anciennes perdurent à ce jour. C'est le cas de Thimechret, la fête agricole qu'on organise pour «thiririth n tregwa». Une fête de l'eau, le jour où l'on décide de remettre en marche les canaux d'irrigation captés à partir des sources et des torrents de montagne pour irriguer les jardins et les vergers. Tous les habitants du village, y compris les expatriés, se doivent d'y assister. Une grande fête est donnée en cette occasion où l'on immole des bêtes et partage un couscous. C'est l'occasion de renouer et de resserrer les liens sociaux. C'est en 2014 que le village a appris qu'il allait abriter le festival Raconte-Arts. Il a donc pris tout le temps pour se préparer à cette échéance, organisant plusieurs réunions et assemblées générales. «Nous avons accepté avec joie et de bon cœur d'héberger cette édition de Raconte-Arts. Nous avons mis tout notre cœur et notre énergie dans cette entreprise et c'est pour cela que c'est une réussite», dit encore Hakim Bessadi. Le festival a permis de faire connaître le village et la région, puisqu'il a drainé selon les statistiques des organisateurs un flux de près 24 000 visiteurs. La présence de dizaines de journalistes de tous les médias a fait que la région a bénéficié d'un coup de projecteur inespéré. La grande force du village, c'est son esprit solidaire. Pour faire face à une guerre de 7 ans qui l'a meurtri dans sa chair, pour vaincre l'adversité d'une nature qui peut se montrer très hostile quand la neige s'amoncelle au point de fermer l'unique route du village, Ath Ouavane a appris à ne compter que sur ses propres moyens et ses dignes enfants. Chaque début de mois, tout le village se réunit en assemblée générale. En cas de nécessité, il le fait plusieurs fois par mois. Quand une décision est prise par consensus, elle n'est jamais remise en cause. Tout le monde y adhère sans rechigner. Si le village d'Ath Ouavane a beaucoup appris de Raconte-Arts, il a également donné une belle leçon à tous ses hôtes et visiteurs : avec l'union et la solidarité, on ne déplace peut-être pas une montagne, mais on peut aider à la faire revivre.