A l'initiative du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) se tiendra à Béjaïa, du 9 au 13 du mois en cours, la troisième édition du colloque international sur le soufisme intitulé « Soufisme culture musique ». Hier, au siège du CNRPAH à Alger, le directeur de ce centre de recherches, Slimane Hachi, a animé une conférence de presse à travers laquelle il a expliqué les raisons qui ont fait que la ville de Yemma Gouraya est choisie pour concrétiser une telle initiative et l'importance de ce colloque. Dans son intervention, il dira que ce colloque est organisé régulièrement en Algérie, mais avec des thèmes différents. C'est durant la deuxième édition, qui s'est déroulée l'an dernier à Tlemcen, qu'il a été décidé de tenir ce colloque cette année à Béjaïa, vu la dimension historique de cette ville « qui remonte à l'antiquité ». Une cité qui a toujours été « un pôle de savoir où ont séjourné plusieurs penseurs à l'exemple de Sidi Boumediène et Ibn El Arabi ». De plus, elle a connu « une des plus grandes batailles menées contre le colonialisme français », à savoir la bataille de 1871 dirigée par Cheikh El Mokrani et Cheikh Ahaddadh. Selon le même responsable, plus de quarante chercheurs venant de plusieurs pays, entres autres les Etats-Unis, la France, l'Allemagne, la Bulgarie, la Tunisie, le Maroc, l'Iran et la Turquie, prendront part à cette rencontre aux côtés des chercheurs algériens à l'exemple de Ahmed Ben Naoum, Rachid Bellil, Allaoua Amara et Zaïm Khenchelaoui. Intervenant à son tour, l'anthropologue Ahmed Ben Naoum précise que ce colloque ne peut « prendre de sens et de réussite sans remettre en cause les conclusions faites jusque-là sur le soufisme. Car il n'y a pas de production de connaissance sans les doutes. Et notre métier de chercheur est de douter de tout ». Sachant que le doute est « difficile à entretenir dans une société conservatrice, où les adeptes des certitudes se sentent menacés » en conséquence. Il ne s'agit pas de parler de soufisme, parce que cela signifie le « clouer », mais des « soufismes » dans le sens de montrer « comment on construit un objet de recherche scientifique ». D'où les trois axes à aborder à cette occasion. En premier lieu, le soufisme dans sa dimension « individuelle » et « savante » et sa relation avec la divinité, une relation que « nous voulons interroger » avec ses facettes culturelle, sociale et politique. Suit la période de transition avec ses conjonctures multidimensionnelles qui « nécessitent des ruptures ». Enfin, la création de la confrérie et des zaouïas qui marque la rupture. A ce stade d'évolution du soufisme, les zaouïas ont un « rôle de régulation » dans la cité. Elles gèrent les conflits et s'occupent de l'éducation, entre autres. Quant à l'Etat, il s'occupe du fisc et de la répression des insurrections pour rétablir l'ordre. Ainsi, « les sociabilités sacrées » s'imposent à ce stade sur les « transformations politiques. L'Etat gère de loin » le rôle important des confréries dans la gestion des affaires de la cité, fait qu'elles instaurent « le système symbolique » qui se traduit par des pratiques qui « passent par le corps et le langage ». C'est ce qu'on constate à travers les pèlerinages, les processions et le dikr. A son tour, le chercheur Zaïm Khenchelaoui a mis l'accent sur les rapports qui lient le soufisme tant savant que populaire au chérifisme, phénomène « héréditaire » dont « se réclament la plupart des fondateurs de zaouïas et confréries en Algérie et autres parties du monde musulman », thème qu'il compte développer d'une manière approfondie lors du colloque en question.