De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Intitulée «Le pouvoir de dire non», la communication de Ouiza Galleze, professeur et chercheur au Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) d'Alger, au 5ème colloque international «soufisme-culture-musique : la chevalerie spirituelle dans l'ordre rahmani» qu'abrite la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou du 14 au 17 décembre 2008, a traité des limites souvent pas faciles à situer entre l'essence religieuse et les effets parfois hérétiques que pourraient induire sur les adeptes l'adoption des comportements soufis et leurs conséquences dans les sociétés à forte dominance politique islamisante telles que la société algérienne actuelle abandonnée à la merci du courant dit islamiste. «Il est simple de définir les capacités d'un soldat à servir son pays ou d'un manifestant à servir une cause. C'est plus délicat de parler du désir de changer les choses dans l'esprit soufi. Entre se mettre au service de Dieu et se retrouver dans l'hérésie, il n'y a qu'un pas. En plus, c'est un monde de silence où les choses sont rarement exprimées. Et quand elles sont dites, elles expriment des sens inconnus au commun des mortels. Alors comment expliquer le sens du devoir et du besoin de lutter ?» explique Mme Ouiza Galleze dans le résumé de sa communication. Elle dira que le soufisme est basé sur le renoncement, le pacifisme, et que c'est le désir de changement qui conduit au soufisme, lequel exprime le rejet d'une situation établie. «Derrière chaque personnage de l'histoire soufie se cache une personne révoltée. C'est parfois cet esprit même de changement qui la conduit sur la voie soufie, du renoncement, le désir d'un monde nouveau. Rab'a al-adawiyya, Ibrahim Ibn Al Adham, Halladj ou Abu Yazid Al Bistami sont tous demandeurs d'un nouveau monde et ont sacrifié leur vie pour y parvenir», ajoute l'universitaire qui citera à titre illustratif Farid Al Dine Attar, propriétaire d'une droguerie, qui a renoncé à tous ses biens pour aller à la recherche de la vérité. Jalal Al Rumi a vu sa vie transformée lors de sa rencontre avec Shams Al Tabrizi : «J'étais cru, j'ai cuit et j'ai brûlé», dira-t-il pour exprimer le sens de cette rencontre. «Alors on s'interroge : quelles sont les limites entre le pouvoir de Dieu et le pouvoir de l'homme ?», renchérit-elle devant un public composé essentiellement d'initiés. Situant l'avènement du soufisme au début du IXe siècle à Bassora et Baghdad, elle précisera que c'est parce que les soufis étaient peu satisfaits de l'enseignement traditionnel du Coran qu'ils opteront pour cette conception de la vie et de la mort, l'esprit et le corps. Parmi les principes capitaux du soufisme, Ouiza Galleze abordera la lutte contre la vie charnelle «qui n'est qu'une apparence de la vie intérieure ; la Rou'ya ou la vue de Dieu ; l'amour divin et le langage, vecteur extérieur de la vie intérieure». Cependant, les partisans du soufisme et leur pensée subiront la répression des souverains successifs. «La pensée soufie sera pourchassée par les souverains dès l'époque umeyyade, on a cherché à la fragiliser, ils n'ont pas hésité à la mater comme ils ont même massacré des communautés soufies», rappelle-t-elle. A noter que la cérémonie de clôture des conférences du colloque a eu lieu mardi après-midi et celle des troupes hier matin.