Les travaux du 5e sommet Union africaine-Union européenne ont pris fin jeudi à Abidjan, en Côte d'Ivoire, sans grandes résolutions. Aucun des grands thèmes abordés n'a fait l'objet de décisions satisfaisantes. C'est le cas notamment du drame des migrants, sujet phare à propos duquel les dirigeants africains et européens s'étaient pourtant promis de trouver des solutions. Si tout le monde, comme a eu à le faire mercredi le président ivoirien, Alassane Ouattara, était d'accord pour supplier les jeunes Africains de ne plus risquer leur vie en mer, personne n'a en revanche préconisé une démarche concrète pour convaincre justement ces futures élites africaines de croire en leur continent et donc de rester chez elles. Les dirigeants européens ont fait aussi de grands et jolis discours (surtout sur la nécessité de stabiliser la Libye) mais ne se sont engagés sur rien. C'est vrai, il y a bien eu cet «engagement fort» des participants à ce 5e sommet de lutter contre l'immigration clandestine et la proposition du président français, Emmanuel Macron, faite en comité restreint, de mettre sur pied une task force policière et de renseignement pour renforcer la coopération entre pays africains et de lancer une campagne de communication pour dissuader les jeunes Africains de tenter l'exode. Est-ce bien suffisant pour tarir les filières de l'immigration clandestine ? Est-ce d'abord la bonne solution ? N'était-il pas plus judicieux de renforcer les structures de coopération existantes plutôt que d'en créer d'autres ? Des propositions comme celles faites à Abidjan, il y en a eu beaucoup par le passé et elles n'ont pas nécessairement débouché sur des résultats tangibles. Même l'appel lancé par le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, pour rapatrier «en urgence» près de 4000 migrants subsahariens «coincés» en Libye paraît difficilement réalisable. C'est, du moins, ce qu'avancent les spécialistes. Les ONG scandalisées En revanche, tout le monde aura retenu que les participants à ce 5e sommet UA-UE n'ont préconisé que des «solutions militaires» à la question des migrants. C'est le cas notamment de certains responsables européens dont la seule préoccupation était clairement de rentrer chez eux avec la certitude que leurs homologues africains entreprendront tout ce qui est en leur pouvoir pour fermer au plus vite les routes de l'immigration clandestine. Près de 700 millions d'Africains ont moins de 25 ans, soit 60% de la population du continent. Des centaines de milliers de jeunes désespérés par le chômage, la pauvreté et l'absence de perspectives dans leurs pays tentent d'émigrer vers l'Europe chaque année. Et cela donne des cauchemars à Bruxelles. Mais en même temps la tentation était grande chez les leaders européens de laisser l'Afrique se débrouiller seule. Ce n'est d'ailleurs pas nouveau. C'est le constat fait par Amnesty International dont le directeur pour l'Europe, John Dalhuisen, pense que « (…) le but de l'Europe est de maintenir fermée la route méditerranéenne» d'immigration. Pour la porte-parole de l'ONG ONE, Friederike Röder, le sommet d'Abidjan s'est également contenté de faire «le minimum syndical (…)». La même source a soutenu que les dirigeants «réitèrent des engagements déjà pris, énumèrent des initiatives qui existent déjà», alors qu'ils auraient dû définir une vraie stratégie commune à long terme pour faire face à l'explosion démographique de l'Afrique. La porte-parole de l'ONG ONE n'a pas tout à fait tort. Personne, du côté européen, n'a visiblement entendu (ou a fait mine de ne pas l'avoir entendue) la partie du discours du président Ouattara dans laquelle il était question de donner un avenir à la jeunesse africaine, d'intensifier les efforts pour lui offrir une éducation de qualité, avec «un effort particulier sur l'éducation des filles, les technologies et le numérique». L'assistance a apparemment raté aussi le passage au cours duquel le chef de l'Etat ivoirien a appelé «à accroître les investissements pour accélérer la croissance économique afin d'offrir des emplois aux jeunes». Concernant ce dernier point, il n'y a eu d'ailleurs aussi dans le communiqué final de ce sommet de deux entre l'Afrique et l'Europe que des déclarations de bonne intention… comme c'est souvent le cas.